Zoom sur la structure bordelaise Bruit Rose Production fondée en 2021 par un des membres de l’association Bruit Rose Music. Le projet développe de nombreuses activités en lien avec la production scénique et la scénographie. Et prépare la première édition d’un festival dédié aux musiques électroniques et aux arts numériques, Displace, qui se déroulera les 26 et 27 avril au Square Dom Bedos.
Crédit photo : Huis Clos (scénographie Bruit Rose Porduction à Bordeaux Electronic Week 2023 credit)
La marque Bruit Rose englobe à ce jour deux projets : le collectif d’artistes Bruit Rose Music, fondé en 2018 par des passionnés de musiques électronique. En parallèle, Bruit Rose Production est une structure désormais inscrite sous la forme d’une Société par actions simplifiée (SAS), qui se spécialise dans la création et l’élaboration de scénographies. Ainsi, « BR » produit ses propres événements et multiplie les collaborations à Bordeaux.
Environnements immersifs
C’est notamment grâce à la diversité de son équipe – entre graphistes, modeleurs 3D, technicien·nes lumières et vidéos, musicien·nes – que Bruit Rose propose des environnements immersifs pour divers lieux et événements culturels locaux. À ses débuts, « le crew a investi dans du matériel de sonorisation fait 100% main pour être complètement indépendant sur les événements » déclarait un membre de Bruit Rose. Avec le temps, les membres de ce collectif ont pris part à la réalisation de nombreuses scénographies pour accompagner leurs performances musicales.
Entre structures scéniques, ingénierie sonore ou arts numériques, Bruit Rose Production construit des expériences globales, à la fois sonores et visuelles via ses scénographies. Mais précisément, de quoi parle-t-on lorsqu’on parle de scénographie ? Mise en scène souvent novatrice, il s’agit de la combinaison d’éléments scéniques technologiques et matériels pour représenter et produire un sens du lieu dans le spectacle.
Histoire scénographique
Initié dès les années 1970 par Kraftwerk et Jean Michel Jarre – pour ne citer qu’eux –, le concept de scénographie fut d’abord très expérimental. C’est dans les années 2000 que celui-ci trouve une place importante dans les évènements culturels électroniques, notamment avec les shows d’artistes tel que Daft Punk – avec leur inoubliable scène pyramide à Coachella, en 2007 – ou encore Etienne de Crécy – et son square cube lumineux pour sa tournée Super Discount réalisé par 1024 Architecture en 2008.
Société française réalisant des installations scéniques depuis maintenant vingt ans, 1024 Architecture joue un rôle majeur dans la conception de décors, mêlant les mondes de l’art, du design et de l’architecture. Référence dans le monde des performances audiovisuelles, cette société a par exemple conçu les projets VTLZR du producteur et DJ français Vitalic ou encore la très originale sculpture lumineuse VORTEX, située à Bordeaux, dans le lieu culturel et « écosystème » Darwin. Valeur ajoutée aux évènements et expérience audiovisuelle complète, la scénographie offre ainsi une immersion intense, plongeant les spectateur·ices dans une atmosphère unique.
« Scénographie immersive » ; « pixels mapping » : les inspirations de Bruit Rose Production
Pour créer le design de ses scènes, ou stage designs, Peyo Bagneres (fondateur de Bruit Rose Production), et ses associés s’inspirent de ce qui se fait aux quatre coins du monde. Ce dernier explique : « avec Instagram, j’utilise des hashtags ciblés – comme « scénographie immersive » ou « pixels mapping » – cela me permet de découvrir des créateur·ices du monde entier qui postent leurs œuvres. Leurs contenus me donnent de nouvelles idées pour créer des stages(scènes, ndlr) innovantes lors de futurs évènements », déclare le fondateur de Bruit Rose Production.
Les influences du collectif viennent également d’acteur·ices important·es du milieu de la scénographie et des arts numériques, notamment les parisiens du collectif Scale, ou encore le studio Setup Design. C’est à travers toutes ces sources d’inspirations que la structure Bruit Rose Production souhaite élaborer les scénographies des évènements culturels sur lesquels elle collabore.
« Casser les codes déjà établis et faire des scénographies innovantes »
Pour mener à bien ses projets, la structure bordelaise n’hésite pas à s’appuyer sur l’expérience d’artisan·es de la région. Pour l’aspect découpes, bois et usinages, Bruit Rose s’entoure par exemple de l’artiste visuel Charl Zarl, membre de 1000m2 et également de Luka Renesson, designer et ébéniste mobilier. L’équipe explique : « En collaborant avec des artisans comme Charl et Luka, ça nous permet de réaliser des designs que l’on ne pourrait pas forcément mettre en œuvre, notamment à cause du coût de certains appareils. Par exemple, Luka a la force d’avoir un atelier avec des machines d’usinage CNC. Avec elles, on peut réaliser des conceptions sur ordinateur et ainsi faire découper ces designs par une découpeuse numérique, ça nous aide énormément pour les projets personnalisés »
Par ailleurs, les Bordelais de Bruit Rose Production n’hésitent pas à repousser les limites des arts numériques en utilisant des logiciels de mapping vidéo et de programmation comme MadMapper et TouchDesigner : « tous nos shows reposent sur cette interface de gestion qu’est MadMapper, il possède de nombreuses fonctionnalités permettant d’améliorer le mapping vidéo standard avec des effets dynamiques et des possibilités d’interaction. »
Casser les codes déjà établis et faire des scénographies innovantes, c’est ça notre volonté.
Peyo Bagneres (Bruit Rose Production)
Sortir de la scène conventionnelle, c’est aussi un objectif que Bruit Rose se donne, comme l’indique Peyo : « On a toujours voulu faire en sorte de monter des structures originales, pour proposer quelque chose de différent lors d’évènements culturels. Casser les codes déjà établis et faire des scénographies innovantes, c’est ça notre volonté. »
Contraintes et normes
Lors de la réalisation de scénographies, il faut pouvoir adapter celles-ci en fonction des lieux des événements. Pour un show situé en extérieur, la principale contrainte est de s’adapter aux contraintes météorologiques, et ainsi réfléchir à une scénographie technique comme une scène abritée et étanche à la pluie – comme ce fut le cas lors du Bordeaux Electronic Week-End de l’été 2023.
Sur des gros projets tel que l’Initial Festival, l’équipe Bruit Rose doit prévoir des documents techniques très fournis et très riches afin de les faire valider par un bureau d’études : « Il y a énormément de normes à respecter, notamment pour ce genre d’événements, une étude est faite sur la faisabilité de notre projet, de nos scénographies. Il y a un bureau de contrôle qui va vérifier que tout ce que l’on a mis dans notre dossier technique est bien implanté en réel, sur site, le jour du festival. La commission de sécurité vient vérifier chaque détail pour que tout soit ok en termes de normes et de sécurités »
Les arts numériques comme expériences immersives
Au fil de ses projets, le collectif Bruit Rose Production souhaite mettre en avant et développer les arts numériques en utilisant des nouvelles technologies. Une façon de changer la perception et la vision de ce qu’est une œuvre numérique ou une scénographie. « Ces installations qui sont propres à elles-mêmes et autonomes sont des œuvres à proprement parler, elles peuvent être interactives et peuvent jouer avec le public et la musique, elles sont directement tournées vers le live play et les mouvements en direct » explique Peyo. Le mapping, la recherche, le développement, la robotique, l’interactivité ou encore la programmation : toutes ces maîtrises technologiques permettent de repousser les limites de propositions artistiques.
Pour Bruit Rose Production, il est important de créer des expériences immersives en mettant de côtés les termes lights & videos jockeys qui ne représentent pas forcément leur vision artistique : « On préfère se diriger vers de la création d’œuvres à part entière et de scénographies qui vivent par elles-mêmes, c’est à dire que le contenu et l’œuvre soit générés par une interaction avec une personne par exemple. »
Afin d’initier et favoriser l’interactivité entre le public et les œuvres, l’équipe Bruit Rose Production collabore avec les typographes et graphistes bordelais Christophe Luez et Sebastien Paquereau : « Ensemble, nous avons vraiment une complémentarité, de leur côté ils sont en charge de toute la partie direction artistique, graphisme et installations vidéo, et du nôtre l’aspect mise en place technique des éléments, pour transformer ces idées en installation physique fonctionnelle. »
Acteurs de certains événements locaux, Christophe Luez et Sebastien Paquereau ont notamment travaillé sur un projet festif collaboratif entre le CAPC et l’IBOAT – deux nuits au musée – ainsi qu’un travail vidéo mené en collaboration avec le producteur KayTV sur l’album Hood Drums. Le duo a également élaboré la direction artistique du Displace Festival, un événement local hybride qui se déroulera les 26 et 27 avril prochain. Christophe Luez proposera pour l’occasion 2 installations numériques en collaboration avec Peyo Bagneres.
Displace Festival : l’union des arts numériques et des musiques électroniques
Aboutissement de leurs deux projets communs et pour fêter les 6 ans du collectif, l’équipe Bruit Rose souhaite avec Displace Festival unir arts numériques et musiques électroniques. Pour l’occasion, l’équipe explique vouloir « Transformer le Square Dom Bedos en théâtre des lumières, rythmées par les vibrations cadencées de sets de haute volée. Un plateau 100% house & minimal sublimé par plusieurs installations lumineuses immersives et interactives » comme confie Peyo.
À l’occasion de cette première édition de Displace, Bruit Rose convie le collectif Scale. Une collaboration inédite ayant pour objectif une « immersion totale et exclusive » à travers une œuvre « exceptionnelle » nommée FLUX. Architecture cinétique composées de lignes de lumière dynamique, celle-ci est motorisée et commandée en temps réel indique Peyo : « La multiplication formelle des lignes couplées par de subtiles variations de phases temporelles, de vitesses et d’amplitudes sculpte un objet organique, oscillant entre vagues poétiques et ondulations frénétiques. » Rendez-vous les 26 et 27 avril prochain pour la découvrir.