Du 18 au 20 juillet se déroulera à Bordeaux la sixième édition du festival en plein air et gratuit L’Astroshøw. Porté par L’Astrodøme, l’événement convoque artistes émergent·es et talents confirmé·es de la scène musicale rock et électronique. On revient à cette occasion sur les missions et la vision du collectif en compagnie de son fondateur et président, Maxime Bur. Entretien.
Crédit photo : Jessica Calvo
Le Type : Ça fait 7 ans que L’Astrodøme existe. Où en est le collectif aujourd’hui ?
Maxime Bur : Le projet est effectivement né en 2017, lancé par des passionné·es de musiques, des musicien·nes et des travailleur·euses du spectacle. On s’est entouré·es de technicien·nes, de communicant·es, de graphistes, puis de chargé·es de prods. Ensuite, on a commencé à réfléchir à des organisations de concert.
Au début, on a fait ça à droite à gauche et puis chez nous, dans notre local associatif. C’est comme ça qu’on a créé une petite communauté autour du projet. Il y avait une ou deux soirées par mois durant la période hivernale dans ce local. On a soudé le projet à ce moment-là.
Par la suite, le projet a évolué. On a commencé à faire des collaborations avec des salles plus grandes. On a commencé à être présent·es dans l’espace public, avec des scènes. C’est comme ça qu’on a imaginé ce format d’Astroshøw Open Air, dès 2018.
Comment a évolué ce format d’Astroshøw au fil des années ?
L’idée était de pouvoir changer d’endroits à chaque édition. Depuis 2018 on en a essayé un certain nombre. Ce qui nous permet aujourd’hui de connaitre un certain nombre d’emplacements avec leurs qualités et leurs défauts. Aujourd’hui, ces événements en plein air Astroshøw sont nos principaux formats.
On préfère se recentrer sur 3 jours et proposer un format de festival plus classique.
Maxime Bur (L’Astrodøme)
Désormais, on se recentre sur un seul week-end, pendant trois jours. On a choisi de faire ça face à la complexité de multiplier les dates, de manière éclatée sur tout l’été. Ça nous évite de devoir remettre à chaque fois en place un dispositif, re-solliciter des bénévoles pour chaque dates… Cela prenait beaucoup de temps dans le projet. On préfère se recentrer sur 3 jours et proposer un format de festival plus classique. Nous avons acté ça cette année. C’est la première fois qu’on va tester 3 jours d’affilés au même endroit.
Pendant l’été, les événements en « open air » se multiplient à Bordeaux. On retrouve souvent les mêmes lieux exploités par les différents promoteurs et collectifs locaux (Square Dom Bedos, les quais de la Rive Droite…). Est-ce que cela n’uniformise pas les propositions artistiques ?
C’est évidemment intéressant de pouvoir défricher de nouveaux lieux. Nous en avons exploré un certain nombre nous-mêmes. Darwin, les Vivres de l’Art, face aux Quinconces, les quais des Chartrons (derrière le hangar skatepark), les quais Saint-Michel, le parc des Angéliques, les quais Deschamps, le Square Dom Bedos ou encore la place du Palais pour les fêtes de la musique.
Malgré tout, des questions de nuisance sonore et de problème de voisinage se posent dans le choix des lieux. Je comprends la Mairie qui ne peut pas animer toutes les places de Bordeaux tout au long de l’année. Les questions de sécurité et de tranquillité publique font que l’offre culturelle extérieure se recentre globalement sur les endroits mentionnés plus tôt. C’est le cas du Square Dom Bedos, très adapté à une offre événementielle. Là-bas, il a moins de risques de nuisance de voisinage. La sécurité du site est par ailleurs optimisée du fait que l’endroit est déjà clos, qu’on peut facilement gérer les flux des publics.
L’espace public n’est pas toujours aussi simple en termes de gestion. Pour les organisateur·ices, c’est aussi une logistique événementielle facilitée, avec des phases de montage ou de démontage plus facile. Les frais de productions y sont diminués par rapport à d’autres lieux – notamment pour la gestion de la sécurité. C’est bien de pouvoir investir des lieux différents mais la Mairie a ses raisons, qui l’obligent à privilégier certains lieux. Et donc, c’est vrai, à réduire les endroits possibles.
Considères-tu qu’il y a malgré tout une diminution de l’expression artistique dans le centre-ville de Bordeaux ? On pense notamment à la récente fermeture du lieu culturel nocturne Tapage pour « désaccords juridiques et administratifs avec la ville de Bordeaux ».
Il y a clairement une politique que je ne soutiens pas forcément, qui est une politique de tranquillité publique. Même si j’expliquais juste avant les raisons de leurs décisions et pourquoi les autorités se recentrent sur des lieux spécifiques, cela a en effet tué les petits lieux culturels, musicaux et lieux de vie qui existaient jusque tard le soir dans le centre-ville.
Tenir un lieu culturel est compliqué en soi. Ça demande beaucoup d’énergie, sur des modèles économiques qui ne tiennent souvent qu’à la passion, avec très peu à la rentabilité. Pour tenir, il faut constamment trouver des systèmes D et des aides. Il y a par ailleurs de moins en moins d’aides. En plus de ça, quand on a des problèmes de tranquillité publique à gérer et une Mairie qui a parfois du mal à trancher sur ces sujets, c’est loin d’être facile.
Je soutiens un centre-ville vivant, où on puisse autoriser des activités culturelles nocturnes.
Maxime Bur (L’Astrodøme)
Je soutiens un centre-ville vivant, où on puisse autoriser ce genre d’activité culturelle nocturne. Aujourd’hui, de contraintes en contraintes, les activités s’arrêtent. Il ne reste que des lieux dédiés et adaptés à ce genre d’activité. Mais ce genres de lieux, adaptés à ce type d’activité, comme les SMAC (Scène de musiques actuelles, ndlr) ou quelques autres salles, n’auront jamais la même fibre citoyenne, sociale, de lieu de vie comme peuvent l’être un PMU, un bar ou un endroit de quartier.
Quels rôles jouent ces plus petits lieux selon toi ?
Il faut qu’on puisse avoir des petits lieux qui peuvent rassembler 50, 60, 80 personnes. Des lieux en mesure d’ouvrir leur porte, sans avoir des charges fixes énormes, et ainsi proposer des artistes émergent·es qui pour certain·es en sont à leur première scène. Ces artistes sont beaucoup plus nombreux·ses que les artistes capables de remplir de grosses salles.
Si on suit cette réalité du terrain, on devrait avoir beaucoup de petites salles et moins de grandes salles. Or, c’est plutôt l’inverse. Et le peu de petites qui restent, combien de temps vont-elles pouvoir tenir ? Même en arrivant à trouver l’énergie et les ressources pour tenir, face aux manques d’aides c’est quand même précaire…
L’une des missions d’Astrodøme est notamment de faire découvrir au public des artistes émergents. Comment évaluerais-tu le dynamisme de la scène musicale bordelaise à ce niveau-là ?
Je trouve que la scène se porte assez bien. Il y aura toujours des gens pour dire qu’avant c’était mieux, je ne suis pas forcément d’accord. Il y a beaucoup de projets qui naissent chaque année. Il y en a qui meurent aussi, évidemment, mais c’est aussi la vie des projets musicaux.
Globalement, je trouve qu’il y a encore une belle énergie à Bordeaux sur l’émergence et la création de nouveaux projets musicaux. On a pas de mal à renouveler des noms sur des premières parties de L’Astrodøme. Pourtant ça fait déjà 10 ans que je travaille dans le secteur culturel et musical à Bordeaux !
Peux-tu nous parler de la programmation des 3 jours de festival de L’Astroshøw ?
On propose des groupes émergents, qui restent assez jeunes dans la musique indépendante. On axe tout sur cette musique actuelle. Après, l’ambition de la direction artistique est de faire découvrir des formes différentes, on prône un certain éclectisme. Sur L’Astroshøw, on a envie de mélanger de la pop, des choses fraîches, à des formes plus punk, plus énervées… Pour nous, mélanger ces publics-là a tout de suite été une force.
Cette approche nous permet de sortir de certains microcosmes. Je trouve intéressant que ces microcosmes existent, avec leurs propres codes, rassemblés autour de style de musique très précis, comme par exemple la cold wave ou le post-punk. Mais c’est encore plus intéressant de pouvoir les mettre ensemble et les mélanger. Avec L’Astroshøw, on parle autant au public d’un Miel de Montagne qu’à des communautés plus rock garage ou indie-rock.
Qu’en est-il des autres formats proposés par L’Astrodøme ?
Nous avons des projets annexes, comme des concerts en salle. On développe aussi un format qui a migré à Capbreton : le Sidéral Psych Festival. C’est un événement organisé avec le collectif Musique d’Apéritif organisé autour de la musique psychédélique. Il a lieu au mois de mai, initialement à Bordeaux, mais on en a fait le tour. Puisque c’est un format pensé en collaboration avec Musique d’Apéritif, et que ce collectif est basé à Biarritz, on a testé de le faire sur la côte landaise cette année, au Circus, un lieu associatif.
Comment vois-tu évoluer L’Astrodøme dans les prochaines années ?
Nous réfléchissons à d’autres projets. L’objectif est de continuer nos temps forts, essayer de les maintenir. Ce sont des moments sur lesquels on réfléchit depuis des années et qu’on maîtrise. Aujourd’hui on souhaite avant tout programmer des choses qu’on a envie de faire, de se recentrer sur un peu moins de choses, afin que ça reste humain.
On a un groupe de travail autour de la programmation, on y passe toutes et tous du temps. On veut essayer de limiter le nombre de dates. On en a déjà beaucoup, on fait notamment des collaborations avec Deus Ex Machina. C’est ce genre de petites collaborations qu’on souhaite priviégier. Ce genre de petits lieux c’est une nouvelle façon de programmer de l’émergence.
Il y a aussi un petit groupe de travail sur un volet management, pour aider des groupes locaux à se développer au sens large. Je n’en fais pas partie mais des gens de L’Astrodøme essaient de voir comment ils pourraient structurer un tel pôle. C’est pour l’instant en cours de réflexion !