Présentation de 5 photographes dont nous avons découverts les travaux sur le net ou sur les réseaux sociaux. Évoluant à Bordeaux, ces artistes travaillent sur des univers et des esthétiques différentes : zoom sur leurs œuvres.
Crédit photo : Tomas Smith
Josef Hélie
Josef Hélie est l’artiste baroudeur par excellence. Son travail de street art consiste à coller chaque photographie à l’endroit précis où le cliché a eu lieu. Il s’est notamment fait connaître grâce aux images de son road trip à travers les États-Unis, 56 degrés, un projet qu’il réalisa en 2016, lors des élections présidentielles du pays. Agréablement surpris par la générosité des étasuniens, il réalise la saison 2 de 56 degrés lors d’un tour de France présidentiel à vélo en 2017.
Habitué aux rencontres et à la découverte de nouvelles cultures, l’artiste, privé de liberté pendant le confinement, utilisa cette contrainte spatiale pour s’interroger sur la notion de frontière dans son projet Horizon(s)1km. Il y dévoile des modèles tournés en direction de l’horizon, d’un ailleurs.
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Josef Hélie – #lapireexcuse -
Josef Hélie – Horizon(s) 1km
En 2019, le photographe et l’association Sorry Children ont proposé lors de la campagne #lapireexcuse de photographier certains citoyens avec leur pire excuse sur le sujet de l’environnement et la planète que les parents laissent à leur enfant. Son travail de photographe street artist était par ailleurs récemment visible lors de son exposition Passages à la galerie bordelaise). Mais Josef Hélie n’a pas prévu de s’arrêter là, il souhaite programmer une nouvelle traversée des États-Unis pour l’été 2022. En attendant, vous pouvez lire Sorry Children, un livre dont il est le co-auteur et qui vient d’être publié.
Olivier Tibloux
Les photographies d’Olivier Tibloux ne sont pas de simples photographies : l’artiste mélange les techniques ! Son travail de « photos-peintures » nous rappelle les toiles de grands peintres, tels que Klimt, Schiele… Ces peintres prenaient comme modèle pour leur toile la femme, à l’instar de cet artiste bordelais. Il tend à se rapprocher de ce que vivaient les peintres lorsqu’ils peignaient, c’est-à-dire capter l’instant qu’ont saisi les peintres sur la toile, l’instant de la création elle-même. Pour illustrer cela, Olivier Tibloux s’inspire notamment de William Bouguereau, un peintre qui demandait à ses modèles de danser plutôt que de poser. Ainsi, la photographie permet aisément de capter l’instantanéité que recherche le professeur de photographie.
Également professeur de philosophie, le photographe joue aussi bien avec les mots qu’avec l’image. À la manière de Klimt, il dissimule le corps nu de ses modèles en superposant à la photographie du fusain, de la peinture, et tout ce qui peut habiller leur corps. Traits après traits, il recouvre de peintures ses modèles, voilant une partie de la photographie. L’artiste ne montre pas tout mais – et c’est peut-être bien là toute la base de son travail.
Depuis son dernier ouvrage Les grandes questions philosophiques, Olivier Tibloux n’a pas perdu sa plume, et finit actuellement d’écrire un roman. En plus de son livre en approche, l’artiste travaille également depuis plusieurs mois sur un tout nouveau projet KhOryaM (Corps et âmes). Entre danse, vidéo et photographie, ce projet s’articule autour de sa muse et co-créatrice, Manya, où, comme immergée, celle-ci danse au milieu de ses souvenirs et de ses images.
- Olivier Tibloux et sa muse Manya sur Instagram
Aurélie Martinez
Aurélie Martinez est une artiste plasticienne bordelaise qui allie anatomie et art au sein de ses œuvres. Passionnée par le corps humain, elle est allée jusqu’à suivre des cours d’anatomie à la faculté de médecine pour approfondir et nourrir sa pratique artistique. Lors d’un stage en deuxième année aux Beaux-Arts, elle a également pu réaliser des dissections sur corps humain (la tête et le cou) avec des étudiants en médecine.
Aurélie Martinez travaille sur la monstruosité du corps humain, ce corps humain dit « monstrueux » lorsqu’il sort de la « normalité » établie par la société actuelle. Qu’il soit marqué par la vie, hybride, ou encore bisexué, la photographe bordelaise ne s’arrête pas aux corps qui ont l’habitude de se dévoiler. Cet intérêt s’observe notamment à travers les titres révélateurs qu’elle donne à ses photographies, que ce soit Pesenteur ou Anamorphose…
C’est après avoir rencontré une danseuse japonaise qui se peignait le corps de peinture blanche que sa pratique artistique évolua. Aurélie Martinez eut l’idée d’intégrer cette blancheur à ses photographies, en surexposant le corps de ces modèles. De cette façon, la couleur du corps tend vers le blanc et se confond avec l’arrière plan, lui aussi blanc, ce qui donne l’impression d’un corps qui disparaît. Ce corps blanchâtre, la plasticienne l’étudie sous toutes ses formes, parfois même dans des positions rocambolesques qui ne sont pas du tout naturelles.
Pleine de surprise, Aurélie Martinez ne s’en est pas arrêtée là. À l’occasion de l’Exposition Organo ayant pour thème « Couleurs augmentées », l’artiste sort de sa zone de confort et expérimente la couleur. Elle dévoile ainsi Thésée, la photographie d’un homme maquillé haut en couleurs. Cette explosion de couleurs contraste avec le travail habituel de l’artiste ainsi qu’avec le corps blanchâtre du sujet. C’est pourtant un pari réussi pour Aurélie Martinez. Avec ou sans couleurs, l’artiste transforme merveilleusement le corps humain, on peut même dire qu’elle le magnifie.
Véronique Lamare
Véronique Lamare n’est pas réellement photographe, son cas diffère un peu des autres photographes précédemment cités. Elle réalise en majorité des performances, installation et vidéos, mais utilise néanmoins le support photographique pour dévoiler les diverses expérimentations qu’elle mène, notamment autour du sujet d’« être un corps », à travers plusieurs notions qui sont la base de son travail : le geste, le mouvement, l’impact, l’empreinte, le déplacement…
Dans sa photographie Action 0, Véronique Lamare dévoile l’empreinte de son crâne inscrite dans un bloc d’argile. Action 0 marque le point de commencement de ses recherches concernant l’expérience d’« être un corps ». Elle réalisa une deuxième version de cette empreinte une dizaine d’années plus tard avec, cette fois-ci, un bloc de cire d’abeille. Certains de ses blocs en cire d’abeille proviennent d’éléments qu’elle a pu prélever dans l’environnement qui l’entoure, lors de ses dépenses. L’artiste est également allée jusqu’à mouler son crâne en plusieurs exemplaires.
Chaque nouvelle expérimentation qu’elle réalise l’amène à en réaliser une nouvelle. Lors d’une de ses expérimentations liant art et science, l’artiste va plus loin dans sa recherche personnelle : elle se filme à l’aide d’une caméra infrarouge. Cette caméra montre les dépenses de son corps, les empreintes laissées ; en clair, tout ce qui n’est pas visible à l’œil nu ! Le choix de la couleur sépia est volontaire, elle questionne la représentation du corps, ses formes, ce que l’on croit percevoir… En clair, Véronique Lamare est une artiste multi-facettes qui ne cesse de surprendre à travers ses expérimentations.
Tomas Smith
Jeune photographe franco-chilien, Tomas Smith aborde différents thèmes au sein de ses photographies. Chacune de ses séries photographiques possèdent une ambiance qui lui est bien particulière mais toutes s’articulent autour de la notion d’intime. La notion d’intime ne renvoie pas seulement à la nudité, l’intime est un thème plus large que ça, propre à chacun. Une photographie dite de l’« intime » peut tout simplement représenter une maison de vacances où l’on allait jouer enfant. À la manière de Sophie Calle et Félix Gonzales-Torres, l’intime peut aussi être représenté par un lit défait, laissant imaginer le corps qui y était allongé il y a quelques instants.
Comme le fait Nan Goldin, l’intime peut également s’expliquer par des actions du quotidien, lorsque l’on prépare à manger, lorsqu’on se maquille devant le miroir… Des actions du quotidien qui nous paraissent anodines mais qui restent issues de notre intimité, de notre environnement proche, et c’est ce que montre merveilleusement Tomas Smith !
À travers ses photographies et l’ambiance qui s’en dégage, le jeune photographe nous fait rentrer au sein de son intimité, comme si nous étions là, juste à côté, en train de regarder la scène qui se déroule devant nous. Parfois énigmatiques, d’autres fois poétiques, les photographies de l’artiste ont du caractère. On sent une véritable histoire derrière chacune d’entre elles.