Sculpter le bois des plages du Sud-Ouest avec Jon Helip

Au cœur du XVème arrondissement de Paris trône un atelier d’artiste pas comme les autres. Le Béarnais Jon Helip a posé ses valises dans la ville Lumière afin d’y faire rayonner ses sculptures en bois flotté. Entre passion pour son métier et sensibilité écologique, il nous fait part ici de ses réflexions. Portrait.

Crédit photo : Xavier Renauld

L’antre de Jon Helip se trouve au coin d’une rue paisible du quartier de Grenelle. Avant même de découvrir les lieux, les sculptures longilignes faites en bois d’océan accrochent le regard depuis l’extérieur. L’artiste nous accueille avec entrain. La discussion se déroule à bâtons rompus. « Je travaille avec du bois dit d’océan. Sa particularité est qu’il évolue dans un milieu salé qui le fige dans sa structure », explique-t-il.

En 2000, alors qu’il se trouve à Guéthary (Pyrénées-Atlantiques), le Palois réalise sa première sculpture. « Cela a été le déclic. » Auparavant, Jon Helip se consacrait au dessin sur bois, qui provenait essentiellement du domaine de la construction. « Ce bois-là était abîmé, travaillé », poursuit-il.

Depuis, il parcourt avec bonheur et assiduité les plages du Pays Basque (Saint-Jean-de-Luz, Bidart…) à la recherche de morceaux de bois rendus par l’Atlantique. « Dans le Golfe de Gascogne, les tempêtes ramènent des tonnes de bois », ce qui en fait une région riche en la matière. « Une réflexion quant à la biodiversité est alors née de la part des municipalités. Il a été décidé qu’il ne fallait pas toucher à cet écosystème durant les périodes creuses, entre décembre et mai. »

Privilégier le côté manuel

Jon Helip travaille comme les artisans d’autrefois. « Tout est fait à la main. Je n’utilise presque pas d’outils électriques. C’est une forme de sobriété. Je considère que les notions de gratuité et de don sont quelque chose d’important », analyse-il. « Lorsque je reçois un bois, il possède une forme et une dimension particulière. Je l’accueille comme il est. »

Soucieux des problématiques environnementales, Jon Helip insiste sur le fait que la simplicité peut jouer un rôle important. « Parfois, les formes de mes sculptures ont l’air élémentaires. Mais je pense que l’on peut faire passer un message avec peu ». Attaché à son pays du Béarn, l’artiste fait le parallèle entre les villages de son enfance et Paris où il a élu domicile. « Dans les territoires, la nature est prise en considération alors qu’au sein des grandes villes, elle a un peu disparu. La cité a un côté agressif », estime-t-il.

Les artistes sont des vigies dans la société.

Jon Helip

Prendre des initiatives

Issu d’une formation d’ingénieur et passionné des arts plastiques depuis toujours, Jon Helip a beaucoup appris auprès de ses deux grands-pères. « L’un était ingénieur en chef chez EDF, l’autre était boucher maquignon. J’avais les deux côtés : manuel et scientifique. » Il poursuit : « Les artistes sont des vigies dans la société. Ils montrent ce qui est essentiel. Se saisir des questions liées à l’écologie est primordiale. Il faut être cohérent dans sa pratique et sincère avec soi-même », affirme le sculpteur.

Engagé, le Parisien d’adoption a collaboré avec une marque de vêtements écoresponsable il y a une dizaine d’années : « Ils cherchaient des ambassadeurs pour porter les valeurs de leur marque autour de la protection des océans. L’initiative était intéressante. »

Toujours enthousiaste et embarqué dans un travail de longue haleine, Jon Helip livre quelques secrets de fabrication. « Mes sculptures ont une dimension reliée au sacré. Il y a un côté primitif et peut-être spirituel. Quand je sculpte, c’est comme une prière ». Dans une société toujours plus tournée vers la performance, il explique « s’interroger sur comment faire du beau et éblouir ». Aujourd’hui, les œuvres de Jon Helip sont présentées dans un recueil de poésie intitulé Promesses d’océan, de Jean de Baulhoo. Les deux hommes ont lié leurs arts, avec pour maîtres-mots « grâce » et « légèreté ».

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