Focus collectif : La Sueur

Zoom sur un collectif qui a insufflé en à peine un an un vent de nouveautés au sein de la scène bordelaise, par son approche libre et décomplexée de la fête. Entre musique, danse et explorations sonores, La Sueur célèbre son premier anniversaire le 10 décembre aux Vivres de l’Art.

Crédit photo : Clothilde Bertin Lalande

Collectif composé de DJs, de danseurs et de danseuses, La Sueur rassemble une communauté qui s’est constituée il y a seulement un an, en 2021, en pleine période de pandémie. En l’espace de quelques mois, le projet s’est imposé comme porte-étendard d’un nouveau genre de soirées à Bordeaux. Militant pour des fêtes plus libres, La Sueur allie espace d’expression de soi, safe space et une diversité d’esthétiques sonores. Avec, toujours en ligne de mire, l’envie de « remettre la danse au cœur de la fête » comme l’explique le collectif lui-même.

Genèse

« Ça paraît fou que ce soit si récent quand on y pense ». La Sueur émerge donc il y a seulement un an. Juste avant le confinement. À l’origine du projet, Meryl Street (Rémi Rasquin) propose à l’époque à Sevenbeatz, producteur, DJ et à la tête du label Le Ciel Records, de le rejoindre dans l’aventure. Plusieurs danseurs et danseuses suivront la dynamique, de même qu’un noyau resserré, soudé et motivé à l’idée de porter un projet qui entend proposer une vision différente de la fête en ville.

Cette vision s’incarne à travers la promotion d’esthétiques musicales jusqu’ici assez peu représentées à Bordeaux. Surtout, la danse joue un rôle central dans cette approche de la fête. La « vraie danse, celle qui fait transpirer, celle qui fait qu’on se lâche et qui permet de se libérer de la pression et des tensions de la semaine » raconte le collectif. Parmi les modèles, on cite des entités comme La Créole à Paris, ou Maraboutage à Marseille. Inspiré par ces soirées qui ont su trouver leurs publics et leur modèle, le crew bordelais se lance le défi de créer des fêtes aux ambiances aussi chaleureuses, vibrantes et libres. En y ajoutant son propre esprit, sa propre vibe et sa signature. Le reste se construit assez naturellement, via des rencontres et des coups de cœur relationnels. D’abord avec Patt (danseuse), puis petit à petit avec d’autres membres qui rejoindront l’aventure par la suite.

Tout fonctionne vraiment en équipe, tout le monde réfléchit et décide ensemble de la manière dont il va construire et faire avancer le collectif.

Meryl Street

Équipe soudée et énergie motrice

Le noyau de La Sueur se compose de trois artistes et DJs : Merylstreet, Sevenbeatz et Marge. À leurs côtés, quatre danseurs et danseuses accompagnent la démarche ; Patt, Juliette, Pearl et Samuel. Marge (Margaux Rapin) gère également la production, tandis que Rihab Hdidou (par ailleurs à la tête de l’agence Salade Tomate Oignon) se charge de la direction artistique et de la communication.

Chacun·e possède un rôle bien défini au sein de l’équipe. « Tout fonctionne vraiment en équipe, tout le monde réfléchit et décide ensemble de la manière dont il ou elle va construire et faire avancer le collectif » indique Meryl Street. « Autour de ce noyau gravite une famille de cœur plus large et très proche de nous. On adore fonctionner en crew et on les embarque avec nous dès que possible : la Maison Ô Fantasme pour les drag shows, la Chemise Club pour le stylisme, notre talentueuse make-up artist Maryloux (Banshees Claws), ou encore notre mascotte légendaire Max. »

La Sueur – Darwin. Crédit: Miléna Delorme
La Sueur – Darwin. Crédit: Miléna Delorme

Dancefloor libre, safe space et liberté artistique

Le collectif La Sueur défend un dancefloor libre, bienveillant et safe. « Même si de plus en plus de collectifs portent ces valeurs – et c’est tant mieux – il reste encore du travail sur ces sujets ! On défend aussi le droit d’être qui l’on veut, de s’habiller comme on l’entend et d’être libres de tous nos mouvements sans jamais se sentir jugé·es, ni avoir peu. On milite pour le droit d’être flamboyant·es, de briller et de revendiquer avec fierté nos identités, quelles qu’elles soient. »

D’un point de vue artistique, le collectif ouvre les horizons, ne s’interdit rien. Ses influences et ses esthétiques naviguent entre des musiques aux sonorités échauffées, chaloupées et rythmées, du dancehall au reggaeton en passant par du baile funk. Le projet a pu être pensé en réaction à une scène locale parfois trop uniformisée. Cette lassitude, le crew l’expérimente à travers des « lignes artistiques figées, qui finissent trop souvent par tuer la spontanéité et la folie d’une soirée. » De là, née l’idée de mettre le public au centre du dispositif, de lui offrir un espace d’expression sans borne. Un terrain d’expression où la danse émancipe, où chacun·e s’amuse.

La Sueur – Fête de la Musique. Crédit: Piko Paseos

Des temps forts : la reconnaissance

Avec cet esprit, le collectif dissémine ces soirées au compte-goutte, créé l’attente. D’abord en investissant les Vivres de l’Art, où la toute première soirée se déroulera le 11 décembre. Malgré un contexte sanitaire défavorable, la fête de lancement – le premier mouvement – aura lieu. Un moment hors du temps selon le collectif : « Le moment le plus marquant de cette année aura certainement été le premier mouvement aux Vivres de l’Art. On ne s’attendait pas du tout à ce que ça parte aussi fort dès le départ. Cet événement nous a porté et encouragé pour la suite. On a senti que les gens avaient vraiment besoin de lâcher prise. Et on a compris assez vite que l’énergie et la liberté des danseurs et des danseuses accompagnaient le public à faire de même. »

Se succéderont d’autres « mouvements », d’autres fêtes, à la fois aux Vivres de l’Art et au sein d’autres lieux festifs bordelais. « La cour du MADD pour la fête de la musique a été une claque monumentale de bienveillance, de bonne énergie et de tolérance. Mais aussi notre quatrième mouvement dans la halle basse de Darwin… ». De quoi créer un engouement face à un projet qui se défait des codes des collectifs locaux.

Au point d’être sollicité par-delà les frontières bordelaises. « On a reçu nos premières invitations en dehors de Bordeaux, pour le OFF du festival Roscella à La Rochelle ou à la Nef d’Angoulême dans le cadre du festival Bisou. » Avec, toujours, le même intérêt porté au collectif et ses valeurs comme en témoignent ses membres eux-mêmes : « L’engouement autour de La Sueur est incroyable, les retours sont hyper positifs après chaque soirée. Ça nous touche et nous motive tellement pour la suite ! ».

Merylstreet et Sevenbeatz – Darwin. Crédit : Miléna Delorme

Répandre La Sueur sur les corps : projets et ambitions

Le collectif fêtera donc son premier anniversaire le 10 décembre aux Vivres de l’Art. Là où tout a commencé. « Il y aura toute la grande famille La Sueur, plein de surprises et on a veillé à ce que ceux et celles qui nous suivent à chaque date depuis le début soient les premiers à choper leur place sur le canal Telegram. » Après plusieurs dates dans des lieux de plus grande envergure, le collectif revient cette fois-ci à un format plus intimiste avec une jauge plus réduite. D’autres projets sont dans les tuyaux, comme l’idée de faire éclore des workshops et cours de danse, ouverts à tous et à toutes, pour tous les niveaux et tous les corps.

Juliette, Merylstreet et Samuel – Darwin. Crédit: Julie Dejeanty

Pièce majeure du collectif, les danseurs et les danseuses de La Sueur viennent d’horizons différents. Du dancehall au flamenco en passant par le contemporain, le voguing ou l’afro hip-hop, cette diversité est une véritable richesse artistique pour le projet. « Ils et elles parviennent à mélanger tout ça avec une énergie incroyable et hyper communicative, le tout porté par une philosophie bienveillante, d’acceptation de son corps, de fierté même, qu’on a envie de partager. »

Ces danseurs et danseuses participent grandement à la dynamique de La Sueur, en proposant une expérience forte pour le public bordelais. « Il y a cette histoire géniale d’une femme enceinte de neuf mois qui est venue sur notre événement à Darwin, avec l’idée d’accélérer le travail en dansant. » raconte le crew. « Elle s’amusait et ne s’est pas ménagée en terme de danse, on la regardait avec un mélange de rires et d’inquiétudes à l’idée que le bébé arrive directement sur le dancefloor ! Une ou un future danseur·euse pour sûr ! ». La relève est assurée.

La Sueur – Darwin. Crédit : Miléna Delorme
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