Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, L’Espace29, lieu de diffusion et de résidence bordelais, met ses locaux à dispositions du cycle de rencontres War is not peace. Ce projet artistique et caritatif intègre l’association Ukraine Amitié et entend agir, à son échelle, contre la guerre en Ukraine.
Les initiatives se multiplient dans le monde culturel et partout ailleurs pour lever des fonds, en soutien à l’Ukraine, envahie par la Russie depuis le 24 février dernier. Les manifestations sont nombreuses dans toute la France. À Bordeaux, le rendez-vous est fixé tous les dimanches, Place de la Bourse. Principalement organisées par l’association Ukraine Amitié, ces manifestations regroupent des centaines de personnes. Les pancartes et les slogans dénoncent les attaques meurtrières de Vladimir Poutine.
L’art et des « choses qui restent » en soutien à l’Ukraine
Malgré tout, ces manifestations sont parfois décrites comme « éphémères », comme l’explique Denys Zhdanov, artiste ukrainien, diplômé des Beaux-Arts de Bordeaux. Il préfère « les choses qui restent ». Pour ça, ce dernier travaille quotidiennement à l’Espace29, qu’il occupe depuis quelques semaines en compagnie d’autres artistes ukrainien·es, dans le cadre du projet War is not peace. Ce projet, pensé en collaboration entre l’Espace29 et Ukraine Amitié, vise à éveiller les consciences tout en offrant un terrain d’expression aux artistes d’Ukraine privé·es de moyens.
L’art est un moteur qui lance la machine de la pensée, de la réflexion, des dialogues, et de l’action.
Denys Zhdanov
À l’Espace29, Denys Zhdanov est ainsi libre de créer ce qu’il entend, aux côtés de ses ami·es ukrainien·nes, Nataliia Azoma, Vira Prokhvatylo, Viktoria Oreshko, Nadia Larina, Andrly Grytsay, Mariia Grytsay, Katia Bokatova-Vincent et d’autres. Il a choisi d’utiliser ce lieu fort, qui soutient l’émergence artistique et sa diffusion, pour un projet artistique et caritatif pour – pour l’instant – une durée de deux mois. Denys décrit l’art comme « un moteur qui lance la machine de la pensée, de la réflexion, des dialogues, et de l’action ». Selon lui, l’art a toujours été un moyen de lutte efficace, et continuera de l’être. À l’Espace29, l’artiste ukrainien est véritablement dans l’action.
Donner la parole aux artistes d’Ukraine
Un appel à participation a par ailleurs été lancé aux artistes ukrainien·nes qui souhaitent proposer une œuvre dans ce cadre, en partenariat avec Ksi Prostir, un lieu d’art à Dnipro en Ukraine. Les œuvres sont ainsi exposées à l’Espace29 tous les jeudis afin de récolter de l’argent pour le pays. Ces soirées (la prochaine a lieu le jeudi 31 mars) permettent aussi de faire découvrir la culture ukrainienne aux bordelais·es, de se rassembler pour discuter, pour manifester son soutien au pays agressé. Des workshops sont également proposés tous les vendredis pour faire des banderoles et des pancartes en vue des manifestations du week-end. Celles-ci sont exposées dans les locaux de l’Espace29.
Les artistes ukrainien·nes présent·s à l’Espace29 sont véritablement « là pour agir ». Le but des résidences et des événements est d’encourager le dialogue, les échanges, pour comprendre ce qu’il se passe réellement en Ukraine. Denys complète : « C’est plus facile à travers un écran, on ne vit rien du tout en fait ». Certain·es sont parvenu·es à faire venir en France quelques membres de leur famille, mais les hommes doivent rester en Ukraine. « C’est une angoisse quotidienne pour nous, le réseau pourrait être coupé du jour au lendemain. Auquel cas nous n’aurions plus de nouvelles… »
Soirées caritatives et échanges nécessaires
La première soirée en soutien à l’Ukraine à l’Espace29 a eu lieu jeudi 10 mars. Les murs blancs du lieu avaient étaient recouverts de pancartes, de banderoles, de dessins, de phrases… Nikita Kravtsov était l’invité de cette soirée. Artiste underground ukrainien, il vit aujourd’hui à Paris et travaille autour de la notion de liberté. Il a peint pour l’occasion une énorme fresque en couleur, très parlante et évocatrice. On y retrouve une allégorie de la liberté, comme chez Eugène Delacroix, brandissant un drapeau Ukrainien, seins nus, sorte de Liberté guidant le peuple du XXIè siècle.
Les murs vont, certes, évoluer au fil des semaines mais l’identité et le message de ces actions restent les mêmes : la guerre doit se terminer. Les discussions à l’Espace29 sont indispensables pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’une simple bataille, qu’il y a de véritables enjeux derrière tout ça : des morts, la destruction d’un pays et de son peuple, de sa culture… L’art présent sur les murs intriguent, certaines œuvres sont pleines de métaphores, presque poétiques, et d’autres sont d’une simplicité marquante qui frappe.