Des Landes à l’Angleterre : entretien avec This Will Destroy Your Ears

Le 4 février dernier sortait À TOI À MOI, un projet de mélangisme musical créatif porté par le groupe This Will Destroy Your Ears. Véritable pied de nez au Brexit et aux confinements, le projet réuni 2 groupes de l’hexagone et 2 groupes d’outre Manche. Pierre-Yo, membre de This Will Destroy Your Ears et fondateur du label landais Cowboy À La Mode, revient sur cette sortie ambitieuse « à 28 mains » et sur les enseignements qu’un tel processus créatif peut entraîner.

Crédits photos : Blanche Konrad

Le Type : Parlez-nous tout d’abord de la naissance du groupe This Will Destroy Your Ears et de votre évolution jusqu’à aujourd’hui.

Pierre-Yo (This Will Destroy Your Ears) : On habite tous dans le même territoire, du côté d’Hossegor et Capbreton. On avait tous nos projets musicaux, et on s’est retrouvés un jour dans une soirée. On s’est tout de suite dit que ça pourrait être cool de faire un truc tous les 3. La semaine d’après, nous étions en studio et 6 mois plus tard, on avait un set de 6 ou 8 morceaux et la possibilité de faire une tournée en Angleterre.

On y est allés comme ça, et ça l’a tout de suite fait entre nous. C’était naturel, on est allés en studio et on n’a pas eu à se poser de questions. C’est une énergie que l’on essaye de garder intacte encore aujourd’hui. J’ai pas mal de relais en Angleterre, notamment via mon label Cowboy À La Mode, c’est pour ça que nous sommes vite partis la bas. Je me suis dit que si ça fonctionnait là-bas, ça fonctionnerait chez nous.

Vous avez fait votre première tournée en Angleterre ; quel retour d’expérience vous en faîtes ?

Quentin dit souvent qu’ils ne sont pas là pour acheter du terrain. Il y a un sentiment d’urgence à faire bouger les choses, c’est différent de chez nous. Tu peux facilement te retrouver dans un pub banal avec 5 groupes différents qui font chacun des sets de folie d’une demi-heure. Sur notre première tournée, on est passé juste après un groupe de petits jeunes. C’était black midi. Ils venaient juste de commencer, je pense qu’ils n’étaient même pas majeurs. Ils ont joué avant nous, mais aujourd’hui on serait bien contents de faire leur première partie.

On vend autant de vinyles en Angleterre qu’en France.

Pierre-Yo (This Will Destroy Your Ears)

Le public est plus sensible aux prestations qui viennent du cœur qu’aux prestations purement techniques comme parfois ici. C’est quelque chose qu’on aimerait transposer à notre groupe. On a fait des allers-retours réguliers entre la France et l’Angleterre. Je pense qu’on vend autant de vinyles en Angleterre qu’en France. Notre prochain album sortira sur un label français et un label anglais.

Comment se sont faites les connexions pour le projet À TOI À MOI ?

Tout a commencé pendant le premier confinement. On ne savait pas trop quoi faire, mais on savait que le Brexit allait être acté. Sur le label, on est très amoureux du rock anglais. Je pense que nous sommes aussi les 2 pays les plus proches en Europe. On est un peu les frères qui se crêpent le chignon, les meilleurs ennemis. L’humour anglais me parle beaucoup plus que l’humour allemand par exemple. Bref, je parlais avec mon pote Sam de Brutalist Record, un label de Portsmouth, et je lui ai dis que j’avais envie de proposer à 2 groupes français et 2 groupes anglais de faire une sorte de mélangisme musical.

Ce n’était pas super clair au début, mais je voulais qu’on fasse des chansons en commun. On a demandé à The Eurosuite, car on connaissait le chanteur et le batteur. On a demandé à Naguals, des potes de Sheffield que l’on aime beaucoup et qu’on a rencontré lors de notre première tournée. Et Shoefiti, un groupe parisien que l’on aime aussi beaucoup, moins connu qu’il ne devrait l’être. Tout le monde était partant.

Quel est le principe du projet ? Comment avez-vous vécu l’élaboration des titres, qu’est-ce que vous en retenez ?

On s’est dit : on est 4, on va faire 4 titres. Chacun lance une idée de début de chanson ; tout ce que l’on voulait, mais construit de A à Z. On avait un Drive commun et chacun rajoutait ce qu’il voulait n’importe où sans avoir à justifier quoi que ce soit. Il fallait juste s’identifier. C’était personnel, pas en fonction des groupes. On s’était tous mis d’accord pour choisir Wayne Adams pour le mix. On avait quasiment tous déjà bossé avec lui. C’est le genre de projet qui l’amuse.

Il avait accès au Drive, il a fait la gueule au début. Il devait faire des choix de coupure très importants pour le projet. C’est lui qui décidait, il a fait un travail de producteur comme on dit aux États-Unis. Il s’est fait plaisir, mais il a essayé de mettre le maximum de pistes. Le projet reste super cohérent, c’est bluffant. On sent les différentes couleurs musicales, les artistes ont des sensibilités communes.

Je suis super content du résultat final. On trouvait que ça valait le coup de les sortir en vinyle, en série très limitée. C’était assez compliqué, car c’était pendant le Brexit, on ne savait pas sur quel « continent » le sortir. J’ai appris qu’il y avait des nouveaux du côté de Marsiac, Vinyle Garcia. Ils se sont lancés juste avant le confinement. On avait besoin de ce côté artisanal que l’on avait eu pendant la création de l’objet, pour garder ça jusqu’au bout.

)

Qu’avez-vous retenus de cette expérience ? Cela vous inspire-t-il pour la suite ?

Je pense que ça nous a tous appris à laisser un peu de temps aux idées. On avait tous des intuitions et des envies, mais ça nous a permis de faire d’autres choses que l’on n’a pas l’habitude de faire. Cela nous a permis de sortir des chemins de traverse.

Comment s’est passée la tournée pour ce projet ?

Naguals est venu dans le Sud-Ouest en avion. On a fait quelques dates puis on est montés ensemble sur Paris, avec l’idée de réunir les 4 groupes sur scène. Malheureusement, The Eurosuite n’a pas pu venir, mais nous étions tout de même 3 groupes. On a joué le titre sur lequel les 3 groupes étaient le plus présent. C’était super cool, car on sait bien que c’est l’une des seules dates où on pourra faire ça. Tout d’un coup, le projet prend de l’ampleur, c’est ça que je retiens. Le public était satisfait, il y avait une super énergie, car on était une douzaine de musiciens sur scène. Étonnamment, on a réussi à mettre en place les chansons quasiment naturellement et sans répétitions. On a gardé la cohérence jusqu’au bout.

Quelle est la suite pour vous, quels sont vos projets à venir ?

On joue le 08 juillet à Villeneuve de Marsan pour le Floc&Rock et le 28 août à l’Atabal (Biarritz) avec METZ (Canada). Là, on bosse surtout sur le prochain album, on veut imaginer une release party qui sera marrante, et qui aurait lieu en France et en Angleterre. On n’a pas encore défini le lieu, mais ça va être cool.

Comment percevez-vous la scène artistique et musicale landaise ? (autres groupes, autres acteurs du secteur de la musique..)

Il y a de plus en plus de groupes entre Bayonne et Hossegor. Il y a Les foudres du bengale, un tout nouveau groupe pop avec qui on est au XL tour pendant 2 ans. Clément Froissart fait une pop marrante comme tout, il y a The Twins Stoners, les stoners du circus. Il y a de nouveaux projets comme le concert de Chokolatine, je n’ai pas tout compris, mais ça à l’air super. Il y a une effervescence qui est assez chouette.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *