Construire « des plateformes pour se rassembler » avec La Sueur

Ayant fait irruption dans le champ lexical de la fête et des événements culturels ces 10 dernières années, les « safer spaces » incarnent des espaces plus sûrs pour des communautés qui expriment le besoin de se rassembler dans des environnements sains. À l’occasion de l’anniversaire de La Sueur le samedi 3 février au Rocher de Palmer, zoom sur ce type de plateforme telle que le collectif en construit à Bordeaux depuis maintenant deux ans.

Crédit photo : Madani Kacimi

« Un environnement permettant aux personnes marginalisées, à cause d’une ou de plusieurs appartenances à certains groupes sociaux, de se réunir afin de s’exprimer sur leurs expériences d’exclusion sociale. » Apparu dans les années 1960 au sein des communautés LGBTQIA+ puis des mouvements féministes, le concept de « safe space » – le terme « safer space » est parfois préféré pour sa dimension de construction, aucun espace n’étant 100% safe – est de plus en plus présent dans le champ lexical de la fête contemporaine.

S’inscrivant dans un contexte plus global où minorités et communautés marginalisées subissent de plus en plus de pressions et de discriminations, une partie du secteur artistique et culturel s’empare de plus en plus du sujet pour défendre une vision d’une fête plus inclusive et protectrice. C’est le sens d’un certain nombre de dispositifs de médiations et de préventions qui se manifestent souvent aussi par un rappel de certaines règles de bases sur des flyers ou des pages Facebook d’événements culturels.

Crédit photo : Miléna Delorme

C’est le cas de La Sueur qui l’exprime en ces termes pour son anniversaire qui sera fêté le 3 février au Rocher de Palmer : « La Sueur vous fait entrer dans sa bulle d’amour avec toujours le même projet : libérer les esprits des contraintes, des mauvais regards et des préjugés, dans un mouvement de fête joyeuse et fédératrice, une envie d’espaces ouverts où tous les corps et toutes les identités s’expriment fièrement. »

« Une plateforme pour se rassembler et s’exprimer »

Rihab Hdidou, membre de La Sueur et co-fondatrice de Feu Flamme (agence qui produit l’événement du 3 février), partage ce constat d’une prévention de plus en plus présente au sein des événements culturels, à Bordeaux et ailleurs. Bien que de nombreux acteurs·ices réalisent des actions autour des enjeux d’inclusion, elle note un manque d’esprit fédératif autour de ces questions. Avec son format Attitudes, La Sueur entend précisément offrir une tribune aux artistes et collectifs locaux moteurs sur ces sujets, afin de mettre en avant les luttes de ces minorités. « Il manquait une plateforme pour se rassembler et s’exprimer » explique Rihab Hdidou. S’exprimer, c’est faire avancer la prise de conscience, Attitudes se voulant être « à destination de la communauté mais aussi de publics plus larges ». 

Une danse solaire qui permet de s’accepter comme on est à 100 %.

La Sueur

Une libération qui s’exprime à travers des prises de paroles, mais aussi par la fête. La danse et le mélange des corps qu’elle implique sont aussi considérés dans ce cadre comme des formes d’expression émancipatrice. La manifestation par le mouvement témoigne de la réalité de nos rapports sociaux, et porte une charge libératrice tout aussi puissante que certains longs discours. Les deux workshops de waacking et de voguing proposés respectivement par Boubou Belbak et Habibitch le samedi 3 février au Rocher de Palmer en témoignent parfaitement : c’est une danse appréhendée comme une manière d’affirmer sa différence, son extravagance, et d’en faire une arme : « C’est une danse solaire qui permet de s’accepter comme on est à 100 %. »

Libérer la parole

Afin d’encourager les prises de parole des invité·es comme du public, La Sueur organise par ailleurs pour son anniversaire des conférences. Une façon de mettre en perspective certains sujets tels que la construction d’une communauté avec Kiddy Smile ou la décolonisation du dancefloor avec Habibitch. Une manière aussi de mêler les approches et croiser les points de vue sur des sujets importants en vue de façonner l’avenir de nos fêtes. L’occasion aussi de donner une tribune à des personnes marginalisées, de « sortir les gens de leur isolement dans une société cisnormé » selon Morgane, membre du Girofard, centre LGBTQIA+ qui tiendra un stand de prévention le 3 février.

L’importance de tenir un stand pour faire communauté

Morgane (Le Girofard)

Le Girofard fait partie des nombreuses organisations présentes à l’événement. Créée en 2007, elle se concentre sur 4 missions : la convivialité, la prise en charge, la pédagogie et la fête. Pour l’événement, l’association prévoie donc de tenir un stand d’information interactif avec l’idée de « faire communauté » comme l’explique Morgane. Elle compte ainsi s’appuyer sur leur jeu des privilèges, un jeu permettant de se mettre à la place de personnes en situation moins avantagées. De quoi réfléchir à la notion de safe space par le jeu.

En conclusion de la soirée produite par l’agence Feu Flamme, Attitudes mettra en avant DJs et performances, dans un contexte de célébration des corps de chacun·e et des diversités artistiques, avec notamment Freya Kor, Alma del Prince (Ô Fantasme) ou Giselle Palmer.

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