Collectif Mellifera : « prendre sa place, sans lutter ni subir »

Zoom sur Mellifera, collectif destiné à des femmes et minorités de genre sur la scène jazz bordelaise. Né d’une volonté d’entraide et de solidarité au sein de l’environnement socio-professionnel de la musique, le collectif est invité à L’Inconnue le samedi 18 janvier pour une conférence-concert sur la question de l’inclusion des musiciennes dans le jazz et les musiques improvisées.

Crédit photo : Joanna Esteves

Mellifera est né de plusieurs « tristes constats ». Interrogée, Émeline Marcon, membre du collectif, les énumère : « peu de femmes visibles sur la scène jazz, peu d’espaces de pratiques sans jugement, solitude des musiciennes (nous ne nous connaissions pas ou peu), discriminations, sexisme, manque de reconnaissance de nos compétences, perte de confiance. » Des réalités qui ont poussées Rozann Bézier à imaginer les contours de ce projet au service de la scène jazz bordelaise.

« Prendre sa place »

Face à un tel état de lieu, la nécessité de créer des réseaux de solidarité apparaît primordiale. C’est ainsi que plusieurs artistes et professionnelles commencent à se regrouper autour de l’entité Mellifera. Leur vision ? Rendre le secteur du jazz plus accessible et inclusif, pour les femmes et les minorités de genre. Une ambition commune qui pousse ses membres à multiplier ses actions, à élargir son horizon. Le projet né ainsi « d’un besoin de se retrouver dans un environnement où ces rouages ne sont plus présents : prendre sa place, sans lutter ni subir » raconte Émeline Marcon.

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Créé en 2021, Mellifera regroupe aujourd’hui une trentaine de musiciennes. Un développement rapide, illustrant la nécessité et la pertinence de penser de tels collectifs contribuant à davantage de sororité dans certains écosystèmes musicaux, comme celui du jazz. Une plateforme où, comme le résume Émeline, il est possible de « réfléchir ensemble et s’entraider dans l’environnement socio-professionnel de la musique. »

Aventure collective et horizontale

Dès le départ, le collectif s’est envisagé comme un laboratoire d’expérimentation, un terrain de jeu. Un espace de création où la musique était à la fois une quête personnelle et une aventure collective. Au sein d’un tel environnement, les musiciennes peuvent trouver un refuge et un « contexte bienveillant », propice à la recherche et à la rencontre. Avec Mellifera, l’objectif n’est pas seulement de jouer, mais de tisser des liens, d’explorer des idées nouvelles, de cultiver une ambiance d’ouverture et de respect mutuel.

Pour mener à bien le projet, Émeline Marcon explique qu’une « association collégiale » a été créée, ses membres étant « attachées à l’horizontalité ». L’équipe est en non-mixité choisie ; elle regroupe des femmes ou des minorités de genre. Aux côtés de la structure gravitent un certain nombres d’allié·es. Pareille structuration a permis à Mellifera se s’élargir et se développer, pour mener à bien un certain nombre de projets.

Jazz déconstruit

Particulièrement actif et divers dans ses activités, le collectif mène des actions « auprès de tous les publics », notamment pour « sensibiliser dès le plus jeune âge sur les questions de genre liées à l’instrument et sur l’esthétique musicale. » Organisation de concerts, de jams, de résidences de jeu… Mellifera multiplie les formats dans le but d’œuvrer à la promotion et la visibilité des artistes girondines.

Crédit photo : Ricky photos

Avec le Conservatoire de Bordeaux, l’association a pu mettre en place des résidences immersives, dédiées à l’expérimentation musicale sur plusieurs jours. Ces résidences offrent aux musiciennes un cadre idéal pour approfondir leur pratique. En parallèle, le collectif mène des actions de médiation culturelle, s’adressant à un jeune public pour leur faire découvrir le jazz et déconstruire les stéréotypes souvent associés à ce genre musical.

En 2025, Mellifera prévoit un certain nombre d’activités ; à commencer par un partenariat avec L’Inconnue à Talence, avec un podcast, une conférence-concert qui sera suivie d’une exposition sur trois mois. D’autres structures du territoire s’associeront avec le collectif, comme le Conservatoire de Bordeaux pour des ateliers, Bordonor et l’association du petit parc pour de la transmission et de la sensibilisation. Et de nombreuses autres résidences musicales à venir. Une année et un programme chargé pour une entité qui remet la question de la non-mixité sur le devant de la scène.