Festival Afriques en vision : 7 films à voir

Le festival Afriques en vision, organisé par l’Institut des Afriques, fait son retour à Bordeaux du 30 novembre au 4 décembre. Pour la troisième édition, l’événement met la thématique des « luttes » au cœur de sa programmation. Besoin de transmission, devoir de mémoire : le continent africain doit autant faire face à une histoire complexe et affronter les combats du présent. Des luttes au cœur de cette nouvelle édition d’Afriques en vision.

À Bordeaux, l’Institut des Afriques, aux côtés de Documentary Africa, Africiné, le FIDADOC d’Agadir, le Cinéma Utopia Bordeaux et la Chaire Diasporas Africaines (LAM / Sciences PO Bordeaux) a co-construit une programmation cinématographique défricheuse pour sa troisième édition. Grâce à un travail percutant et solidaire, le projet franchit les frontières territoriales créant des dynamiques culturelles autour des contextes africains. Outil permettant de mettre en évidence les histoires oubliées du monde, le cinéma joue un rôle majeur dans la sensibilisation des consciences. De quoi laisser dire à Mohamed Saïd Ouma, directeur de Documentary Africa que « Notre cinéma détient le pouvoir de remodeler les récits, de mobiliser les mouvements et de remettre en question le statu quo. » C’est en ce sens que son organisation et l’Institut des Afriques s’associent pour proposer un programme culturel ambitieux.

Le continent africain a pu se relever de périodes historiques sombres et douloureuses grâce notamment à de nombreux acteurs et actrices qui ont consacré leur vie au « processus de réveil » du continent. Parmi elles et eux, des cinéastes, documentaristes et archivistes ont mis à l’écran certains récits africains peu connus. Le cinéma rend palpable le devoir de mémoire en ce qu’il fige les images intemporelles des combats menés et forge un sentiment d’unité. À l’occasion d’Afriques en vision, zoom sur certaines causes abordées lors du festival.

Transmission générationnelle 

Transmettre : c’est ce que Safi Faye, anthropologue et ethnologue sénégalais, a réalisé tout au long de sa carrière de réalisatrice. Dans son deuxième film documentaire Fad’jal (Grand-père, raconte-nous…) sorti en 1979, elle met en avant la transmission de culture de génération en génération. Au-delà de comprendre la question de l’héritage culturel, cette œuvre valorise la culture rurale sénégalaise. Une histoire de « succession » de valeurs pour que les plus jeunes puissent s’approprier les codes des aïeux pour bâtir leur propre avenir. Safi Faye a créé des œuvres indispensables pour le Sénégal, mais aussi pour tout le continent africain. Elle laisse derrière elle un bagage cinématographique précieux aux images touchantes.

fad-jal-safi-faye
Fad’jal – Safi Faye

Archives précieuses

Thierno Souleymane Diallo, lui, se lance dans une recherche d’archive inoubliable dans son film documentaire Au cimetière de la pellicule. Il y retrace son propre périple pour retrouver la pellicule Mouramani, réalisée par Mamadou Touré. Cette enquête est cruciale puisqu’il s’agit du premier long-métrage réalisé par un francophone issu d’Afrique noire. Dans ce film, le réalisateur souligne l’importance de cet objet nécessaire. On retrouve un sentiment de devoir de mémoire qui vient compléter l’identité du réalisateur mais aussi celle de tout un pays.

Au-cimetière-de-la-pellicule
Au cimetière de la pellicule – Thierno Souleymane Diallo 

Le passé écrit au présent

Yolande Zauberman retranscrit le passé tragique sud-africain dans son premier film Classified People. Sorti en 1987, ce documentaire raconte la vie de Robert et Doris, deux Sud-africain·es « classé·es » comme métis et noire dans une Afrique du Sud brisée par l’apartheid. Yolande Zauberman accentue l’aberration de cette période lugubre, qui malgré tout, laisse une place pour l’amour de Robert et Doris. Le film Classified People rappelle l’absurdité de la discrimination raciale et les conséquences douloureuses d’une société totalement divisée.

shellac-classified-people-image-6012-copyright-shellac
Classified people – Yolande Zauberman – Crédit Photo : Shellac

Enjeux environnementaux 

Le film Sitabaomba de Love Nantenaina retrace la lutte environnementale en cours dans plusieurs régions d’Afrique. De Madagascar au Burkina Faso, les populations locales se battent pour contrer les projets insensés de multinationales puissantes et avides de profit. C’est une longue lutte qui s’inscrit dans des enjeux écologiques planétaires. De nos jours, les décisions démesurées et irresponsables de grandes compagnies ou de gouvernement riches alarment les populations. Mais est-ce que l’Afrique est assez entendue dans ce combat globalisé ?

Sitabaomba - Lova Nantenaina
Sitabaomba – Lova Nantenaina

La lutte solidaire pour l’économie de la Centrafrique

Dans Eat Bitter de Pascale Appora-Gnekindy et Ningyi Sun, on distingue un sujet moderne en Afrique aujourd’hui. En effet, beaucoup d’investisseurs et ouvriers étrangers se tournent vers l’Afrique, car le développement du continent est source de grands bénéfices. Comment deux hommes, issus de pays complètement opposés géographiquement et culturellement, cohabitent-ils ? Au cœur de Bangui, un constructeur chinois partage une vision de progrès avec un ouvrier centrafricain. Les deux hommes collaborent pour le progrès économique d’un pays qui souffre de la pauvreté. 

Eat Bitter - Pascale Appora Gnekindy & Ningyi Sun
Eat Bitter – Pascale Appora-Gnekindy & Ningyi Sun 

Franc CFA ou l’ennemi n°1 

Katy Léna Ndiaye, nous plonge dans le passé colonial de l’Afrique avec L’Argent, la Liberté : une histoire du franc CFA. Alors que cette monnaie est créée dans les années 1960 par la France afin de mieux contrôler les anciennes colonies, le franc CFA est toujours utilisé aujourd’hui. Un scandale depuis la décennie des indépendances, qui a souvent été source de colère des populations africaines. Celles-ci accusant la France d’emprise néo-colonialiste et parfois même corruption… Est-ce que les dirigeants africains peuvent reconstruire l’économie du continent sans avoir une monnaie entièrement africaine ? Avec ce film documentaire, Katy Léna Ndiaye propose de relancer un débat laborieux qui tarde à apporter des réponses concrètes.

Franc CFA- dessin Afrique
L’Agent, la Liberté : une histoire du franc CFA – Katy Léna Ndiaye

La place de la culture dans le monde moderne 

Enfin, pour clôturer cette troisième édition d’Afriques en vision, l’artiste Baloji présentera son premier long-métrage nommé Augure. Artiste engagé depuis plusieurs années, celui-ci propose une fiction sur quatre personnages qui portent le poids d’une culture sur les épaules. Considéré·es comme des sorciers et sorcières à l’origine des maux des autres, ils et elles sont injustement écarté·es de la vie en société et de leurs proches. Augure questionne ainsi les limites des croyances et les conséquences éprouvantes d’une culture fortement ancrée.

}

En somme, le cinéma africain se veut novateur tout en explorant le passé du continent. Les différent·es réalisateurs et réalisatrices apportent une vision sincère des récits africains, contribuant à l’évolution culturelle du continent. Ces initiatives cinématographiques permettent la circulation des idées et une réelle discussion sur les défis à relever pour son futur.

One reply on “ Festival Afriques en vision : 7 films à voir ”
  1. Bonjour,
    J’aimerais juste pouvoir disposer des contacts de maison de production ou ayants droits des films que vous projetez durant votre festival.
    Nous sommes une génération de jeunes africains vivant à Neuchâtel en Suisse. Nous organisons chaque année, un modeste festival de films d’Afrique et de la Diaspora. Nous souhaitons collaborer avec vous ou avec les productrices, producteurs ou encore les réalisatrices et réalisateurs pour que leurs oeuvres soient vues dans d’autres milieux et contrées.
    Merci et bon festival
    Pour l’Agence Culturelle Africaine-ACA
    Monsieur Zal Saliou NDIAYE
    Case Postale 1631
    CH-2001 Neuchâtel – Suisse
    Tél: +41 78 881 54 66
    agenceculturelleafricaine@bluewin.ch

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *