Quand des festivals néo-aquitains passent la seconde vers des mobilités plus douces

En Nouvelle-Aquitaine, plusieurs festivals entendent réduire leur empreinte carbone par le prisme des mobilités. Passage en revue des bonnes pratiques sur le sujet, en s’appuyant sur les initiatives d’Arte Flamenco, Bordeaux Open Air, Musicalarue et SunSka Festival.

Crédit photo : Cédric Lagarde (Bordeaux Open Air)

Depuis 2023, le SunSka Festival, Arte Flamenco, Bordeaux Open Air et Musicalarue unissent leurs forces dans le cadre du dispositif Festivals en Mouvement. Un projet ambitieux, mais indispensable : réduire l’empreinte environnementale des festivals en s’attaquant à la plus grande source de pollution de tels événements : les transports.

Si  les festivals sont généralement appréciés pour leur programmation et leur ambiance, on oublie souvent que les déplacements (en voiture, train, etc.) représentent à eux seuls 70 % de leur empreinte carbone. Pour rendre la fête plus verte, c’est donc sur ce point qu’il faut agir. C’est tout l’enjeu de Festivals en Mouvement, un dispositif lancé par R2D2 (auquel le RIM s’associe en Nouvelle-Aquitaine), un collectif de réseaux régionaux qui rassemble une cinquantaine de festivals en France pour réinventer les façons de se déplacer de manière plus durable et plus sûre. En 2024 et 2025, le collectif mène des expérimentations concrètes autour du vélo, du covoiturage, de la communication et des concertations. En Nouvelle-Aquitaine, les festivals SunSka, Arte Flamenco, Bordeaux Open Air et Musicalarue ont choisi de s’engager sur cette voie.

Des stratégies variées pour un objectif commun

Face au défi de la mobilité durable, les festivals déploient des actions spécifiques, adaptées à leur environnement et à leur public. Pour les festivals implantés en milieu rural comme Musicalarue et SunSka, les navettes jouent par exemple un rôle essentiel : « Nous travaillons avec la Région Nouvelle-Aquitaine sur la mise en place chaque année de cars au départ de la place des Quinconces à Bordeaux qui dépose les festivaliers directement sur site, avec un arrêt pour les médocains à Castelnau-de-Médoc » explique Charlotte Gomez, responsable des partenariats de SunSka.

Musicalarue, situé à Luxey, voit pour sa part une hausse de 70 % de l’utilisation de ses navettes entre Mont-de-Marsan et le site du festival, un succès notable. SunSka, autre festival ancré en milieu rural, propose lui une gamme étendue de navettes depuis la gare et Bordeaux, tout en explorant des collaborations avec la SNCF et la Région.

Le modèle de notre festival a été construit pour favoriser au maximum l’accès de nos sites en mode de transport durable.

Camille Cabiro (Bordeaux Open Air)

L’enjeu est différent pour Bordeaux Open Air, festival urbain par essence, dont l’accès est déjà facilité par le tram, le bus et le vélo. Sa localisation au cœur de la métropole bordelaise rend les mobilités douces presque évidentes, comme le détaille Camille Cabiro, co-fondatrice de l’événement : « Le modèle de notre festival a été construit pour favoriser au maximum l’accès de nos sites en mode de transport durable (accessible en tramway, bus et vélo) donc le public utilise ces modes de transport tout naturellement ».

Bordeaux Open Air. Crédit photo : Arthur Brémond

Le covoiturage : un levier partagé aux résultats contrastés

Le covoiturage est une solution que tous ces festivals s’efforcent de promouvoir, mais avec des approches et des succès divers. Musicalarue utilise des plateformes officielles, un groupe Facebook dédié et innove cette année avec un « mur des petites annonces » physique pour le covoiturage. Arte Flamenco, confronté à un public plus âgé et à un territoire vaste et mal desservi, s’appuie lui sur la plateforme Tribulive pour inciter au covoiturage. Cependant, l’équipe concède que « le changement d’habitude est lent » dans leur contexte.

De même, le festival SunSka encourage le covoiturage via un groupe Facebook et WhatsApp pour les bénévoles, tout en ayant identifié, grâce à une étude d’impact sur la mobilité des publics réalisée par les membres de Festivals en Mouvements en lien avec Sociotopie de 2023, que l’habitude de la voiture est le principal frein à surmonter pour un public en milieu rural.

Comprendre les freins et adapter la communication

La sensibilisation et la communication sur les enjeux de mobilité douce sont des piliers pour l’ensemble des festivals. Bordeaux Open Air intègre naturellement la promotion des mobilités douces via son site et ses réseaux sociaux, en lien avec son esprit urbain, comme l’indique Camille Cabiro : « nous communiquons régulièrement sur les mobilités douces via notre site internet et sa rubrique « pour venir », dans la description de nos événements et via des posts réguliers sur nos réseaux sociaux». Arte Flamenco mise pour sa part sur des ateliers de sensibilisation à l’environnement pour les enfants, les considérant comme de futurs ambassadeur·ices.

L’idée c’est à la fois de sensibiliser le public sur l’impact carbone des mobilités et de l’informer sur les alternatives proposées.

Charlotte Gomez (SunSka Festival)

SunSka met lui l’accent sur une campagne nationale de communication de Festivals en Mouvement, cherchant à informer et à atteindre les publics les plus réfractaires au changement. L’étude menée par le festival souligne que l’enjeu est de cibler ceux qui utilisent leur voiture quotidiennement, comme l’évoque Charlotte Gomez, responsable partenariats du festival « L’idée c’est à la fois de sensibiliser le public sur l’impact carbone des mobilités et de l’informer sur les alternatives proposées.»

Arte Flamenco

Engagement écologique et défis persistants

L’engagement des festivals pour les mobilités durables est souvent lié à leur ADN et leurs convictions. C’est le cas de SunSka, précurseur dès 2008 avec son équipe Eco SunSka, pour qui cet engagement est essentiel pour rendre l’événement accessible au plus grand nombre dans un milieu rural. Bien que Musicalarue ait volontairement abaissé sa jauge pour limiter son empreinte, l’objectif principal de ces festivals n’est pas d’accueillir plus largement, mais de mieux accueillir et de réduire leur impact.

Si Musicalarue observe déjà une évolution notable de l’utilisation des navettes, la majorité des festivals reconnaissent la lenteur du changement d’habitudes, particulièrement en milieu rural. De son côté, Bordeaux Open Air identifie un public plus apte à changer ses habitudes, ce qu’évoque Camille Cabiro : « Il est difficile pour nous de mesurer l’évolution des déplacements de notre public même si nous avons entamé ce travail en 2023 notamment via des questionnaires lui étant destinés. Ce que l’on identifie en revanche, est le fait que notre public nous suit avec de plus en plus de facilité à travers la métropole bordelaise et que la barrière de la distance est beaucoup moins ressentie grâce au nombre grandissant de modes de transport doux. » Mais toutes et tous partagent la même vision : réinventer collectivement les mobilités pour des événements plus durables, plus conscients et en phase avec l’avenir qu’ils et elles souhaitent célébrer.