Entretien : sds, le magicien des souvenirs

Du jardin de ses parents à Ola Radio en passant par Bordeaux, sds traduit en musique ses souvenirs d’enfance. Naviguant entre musique ambient, techno berlinoise ou hardstyle, il sortira son premier EP intitulé La Maison du Soleil le 10 août prochain sur le label d’Ola Radio : Olga Productions. Plongée dans l’univers d’un projet singulier et lumineux.

Crédit photo : sds & migi

Le Type : Salut sds ! Peux-tu commencer par te présenter pour nos lecteur·ices qui ne te connaîtraient pas ?

sds : Hello ! Je m’appelle Étienne, aka « sds » ou encore « eti », pour les intimes. J’ai 23 ans, et je viens des environs de Bordeaux. Ça fait maintenant quatre à cinq ans que je fais de la musique. Ce sont des artistes comme lilac, deadangel ou encore le collectif sens1tive qui, à l’époque, m’avaient motivé à
composer mes propres titres.

Depuis environ 1 an, mon genre de prédilection a beaucoup changé. Je continue à produire mais, cette fois-ci, des titres de musique ambient ou bien même de techno berlinoise, voire de hardstyle.

sds

Il y a environ 3 ans, j’ai commencé à produire mes propres parties instrumentales, fortement inspirés des travaux de beatmakers comme Shinjin, with3r ou encore sglily. En mai 2019, j’ai rejoint le collectif crystalclub, je me suis beaucoup investi dans ce dernier. Sans cette expérience, je pense honnêtement que je ne ferais plus de musique aujourd’hui. Le crystalclub a duré environ 4 ans. L’aventure s’est terminée au début de cette année 2022. Je suis redevable de tous les moments passés avec ce dernier. Tous ensemble, on aura été une grande famille. Depuis environ 1 an, mon genre de prédilection a beaucoup changé. Je continue à produire mais, cette fois-ci, des titres de musique ambient ou bien même de techno berlinoise, voire de hardstyle.

En 2021, tu avais une résidence au sein de Ola Radio, aujourd’hui située à Marseille. Qu’est ce que cette expérience t’as apporté aujourd’hui ?

La résidence sur Ola Radio a commencé via le crystalclub. Le but de l’émission bi-mensuelle était de produire un mix par artiste. Dans chaque émission, j’invitais un des membres du collectif à me concocter une tracklist et je la mixais pour lui. J’ai commencé les mixes en septembre 2021 alors que je n’avais reçu mes platines qu’en août. Ça n’a pas été facile au début, il m’a fallu tout apprendre de moi-même, mais les bases en production aident beaucoup à comprendre les mécanismes de DJs.

C’est donc malheureusement avec la fin du crystalclub que la résidence prendra fin elle aussi. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot ! Je compte revenir à la fin de l’été sur Ola Radio pour y devenir résident, seul cette fois-ci. Les détails arriveront bientôt, j’ai hâte de recommencer une résidence sur cette radio.

sds

Au fur et à mesure des émissions, je suis devenu de plus en plus à l’aise. C’est dans la première émission que j’ai invité april21, un membre de #cc (crystalclub) et ami qui était partant pour faire partager ses goûts dans un format « mix ». C’est après la première émission que les gars m’ont proposé qu’on diffuse en live. La seconde émission, celle de novembre, a été retransmise sur Twitch. Niveau stress, c’est quelque chose de complètement différent d’être filmé et retransmis en direct sur Ola Radio et sur Twitch.

Vivre ce genre d’expérience m’a permis de mieux gérer ma panique vis-à-vis des performances live, des moments souvent très anxieux pour moi. C’est donc malheureusement avec la fin du crystalclub que la résidence prendra fin elle aussi. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot ! Je compte revenir à la fin de l’été sur Ola Radio pour y devenir résident, seul cette fois-ci. Les détails arriveront bientôt, j’ai hâte de recommencer une résidence sur cette radio.

Ton projet qui sort ce mois-ci s’intitule La Maison du Soleil. Pourrais-tu nous éclairer sur ce choix de nom ?

(rires) J’avoue que c’est assez mystérieux, mais ce titre est très important pour moi ! Quand on est arrivé·es dans la maison dans laquelle j’ai grandi avec mes deux sœurs, on a découvert une inscription en métal sur la façade avant. Le texte n’était pas facilement lisible. Il n’utilisait pas l’alphabet français. Ma grande sœur a donc pris la liberté de se rendre sur Internet et d’essayer de traduire ce texte. Il me semble que le texte était inscrit en grec et qu’il disait « la maison du soleil » (j’essaie de faire confiance à ma mémoire).

Alors, peut-être que la traduction est erronée, peut-être que le texte n’est pas du tout en grec et qu’il dit quelque chose de complètement différent. Mais le fait est que toute ma famille a vécu dans cette maison en se disant que son nom était « la maison du soleil ». Ce projet me rappelle beaucoup mon enfance et les moments que j’ai pu vivre à cet endroit. Il me semblait donc logique de le nommer comme celui-ci.

Considères-tu cet EP comme ton premier projet solo ?

En effet, cet EP c’est à 100% mon premier projet solo ! J’ai jamais autant travaillé sur une sortie je crois… J’ai été aidé d’amis comme Xavier pour les retouches de la cover, Alice d’Ola Radio pour toute la distribution et le mastering, mais je le considère comme un projet solo.

Je n’ai jamais vraiment eu la force de produire un projet entier, j’ai toujours eu des bouts de scrap et de wips pas finis qui trainaient sur mes disques durs, mais j’avais jamais la motivation d’en faire quoi que ce soit. Je tiens vraiment à remercier Xavier de m’avoir motivé à faire ce projet. Sans lui je pense pas que je serais allé au bout.

Ta musique semble intrinsèquement liée au monde de l’image. Peux-tu nous parler de la pochette de ton projet et de ce qu’elle représente pour toi ?

J’ai eu une formation de graphiste au lycée, et c’est même mon métier de la vie de tous les jours. Je pense que c’est en grande partie ce pourquoi la musique, en général, m’inspire tant visuellement. Pour la pochette, j’ai vraiment essayé de faire passer le feeling de l’EP à travers cette image. Bien sûr, c’est pas facile de retranscrire 100% de son œuvre à travers une seule photo, mais je voulais garder l’esprit sombre, atmosphérique de mes sons dans une seule image.

La lumière diffuse qui illumine la prise de vue et se reflète sur l’environnement représente ma famille, les expériences que j’ai vécues à cet endroit. Cette photo, je l’ai prise moi même. J’ai recréé le modèle de ma maison avec des brindilles d’arbres entourées de papier mâché, puis fixées de manière à prendre la forme de la véritable maison. L’endroit où elle a été prise, c’est le fond du jardin dans lequel j’ai grandi. Ce que j’aime avec cette cover, c’est que pour une personne lambda, c’est juste une maison dans l’herbe, rien de dingue. Mais pour mes amis et ma famille, ça représente quelque chose de beaucoup plus personnel, et quelque chose auquel ils et elles peuvent se rattacher.

En parlant de rattachement, on ressent une dimension très personnelle dans ce projet, notamment par le titres des chansons. Pourtant, au niveau de la musicalité, tu sembles avoir laissé ouvertement la place à l’auditeur et à l’auditrice de se retrouver. Comment expliquerais-tu cette dualité ?

Je n’avais pas envie de donner trop de contexte aux auditeurs et aux auditrices. J’aime bien laisser aux gens s’imaginer ce qu’ils veulent. Je trouve ça même intéressant de faire écouter un son à deux personnes différentes, et de voir comment chacun·e l’interprète. Quand ce que les gens ressentent en écoutant ma musique est proche du sentiment originel que je voulais faire passer, ça me donne encore plus envie de créer et de partager.

C’est là la force des sons ambient complètement instrumentaux. Vu qu’il n’y a pas de paroles chantées, il y a moins de risques que les gens interprètent ça de la « mauvaise » façon – même s’il n’y a pas de mauvaise interprétation, selon moi.

sds

C’est quelque chose qui me fascine, parce que chaque personne a ses propres expériences, vouée à ressentir quelque chose de très personnel. Je pense que c’est là où j’avais envie de laisser une liberté d’interprétation. Si j’avais commencé à donner trop de détails et trop de pistes aux auditeurs et aux auditrices, je me dis que j’aurais peut-être perdu l’occasion que quelqu’un s’identifie à mon travail. C’est là aussi la force des sons ambient complètement instrumentaux. Vu qu’il n’y a pas de paroles chantées, il y a moins de risques que les gens interprètent ça de la « mauvaise » façon – même s’il n’y a pas de mauvaise interprétation, selon moi.

L’enfance et les souvenirs, c’est la genèse de ce projet selon toi ?

Oui, j’en suis convaincu. Chacun des titres me rappelle des moments de mon enfance, des moments qui m’ont marqué. Malheureusement, ma mémoire sur cette partie de ma vie s’efface peu à peu. À travers ce projet, j’essaye peut-être de conserver une partie de ces souvenirs et sentiments que j’ai pu ressentir, par peur de les perdre encore plus.

Pourrais-tu citer quelques artistes qui ont eu une influence sur ton EP ?

elio, april21, deux artistes qui faisaient partie du #cc et d’autres comme matthewdavid’s mindflight, himera, anima, torus, malibu / dj lostboi ou encore peake. Il me manque probablement beaucoup d’artistes dans la liste, c’est compliqué de citer des influences majeures de ce projet, parce que – et attention ça sonne très pompeux – je voulais essayer de créer quelque chose de très personnel, et donc de relativement unique.

On observe un essor des genres ambient, minimalist pop depuis quelques temps, notamment avec la sortie du projet Galore de Oklou, pour qui tu as d’ailleurs ouvert en mai dernier à l’IBOAT. Pourtant, ça reste des genres musicaux encore très peu mainstream. Tu arrives à te retrouver musicalement dans cette scène, au niveau local ?

Comme tu le dis, on voit un essor de ces nouveaux artistes qui contribuent à ces « nouveaux » genres pop inspirés d’ambient et de musique électronique, mais malheureusement, ce n’est pas à Bordeaux que j’en croise le plus. C’est plutôt à Paris que ces artistes sont le plus représenté·es, comme avec les soirées du collectif white garden et aux États-Unis avec celles de Curiosity Shop.

Mais je suis sûr que de plus en plus d’artistes apparaîtront sur la scène locale bordelaise. J’ai d’ailleurs hâte d’assister à leurs performances live. Qui sait, peut-être que ça serait intéressant de démarrer un collectif bordelais qui vise à populariser cette scène dans la région ?

Merci d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Pour finir, est-ce que l’on peut s’attendre à une date de concert où tu joueras ce nouveau projet ?

Merci à toi pour tes questions super intéressantes, ça m’a fait plaisir d’être interrogé comme ça sur mon travail, c’est un truc que je fais pas souvent. Côté dates, malheureusement, rien de prévu pour l’instant. On a pas mal de projets de performances live avec des amis qu’on aimerait vraiment faire, mais rien de sûr à 100% pour l’instant. Du coup, je garde ma bouche cousue.

  • sds, La Maison du Soleil (Olga Productions), 10 août
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *