Depuis le 23 septembre 2021 se tient l’exposition arboretum dans la galerie blanche d’arc en rêve, centre d’architecture qui jouxte le CAPC depuis 1981. Menant des actions de sensibilisation culturelle dans les domaines de l’architecture, de la ville, du paysage et du design, le lieu met en lumière avec arboretum les liens étroits entre arbres et architecture.
Le titre arboretum renvoie aux jardins botaniques spécialisés, généralement conçus comme des espaces paysagers qui présentent de nombreuses espèces d’arbres ou d’essences. Un terme architectural donc, qui entre parfaitement en résonance avec le contenu de l’exposition. Celle-ci fut élaborée en interne par quatres architectes, commissaires de l’exposition. Parmis eux, le directeur d’arc en rêve, Fabrizio Gallanti, ainsi que Wenwen Cai, Eric Dordan et Leonardo Lella
Explorer les liens entre arbres et architecture
arboretum a été l’occasion pour les quatres architectes-curateurs de l’exposition d’investir la galerie blanche d’arc en rêve, pour la transformer en une sorte de forêt conceptuelle, lieu de méditation et de réflexion sur l’arbre, à travers le prisme de l’architecture. Pour cela, l’intégralité de la galerie a été parsemée de longues tiges de sapin blanc, allant du sol au plafond, pour recréer un univers proche de la forêt. L’immersion est totale. Pour renforcer ce côté balade dans les bois, il est intéressant de noter que l’exposition n’a aucun sens de visite ni même d’ordre de présentation des œuvres. On s’y promène au gré de sa curiosité.
Au détour de notre promenade on peut croiser des objets, des images, des plans et des maquettes de lieux et d’époques différentes. On peut ainsi passer en quelques mètres de la photo d’un projet architectural des années 80 à un tronçon de l’un des arbres de la liberté du XVIIIème siècle. Les objets et projets présentés sont tous reliés par ce même mot d’ordre : «arbres et architecture». Le but de cette mise en place éclectique est de laisser aux visiteur·ices la possibilité de créer des liens logiques entre les différents éléments et d’ainsi nourrir une réflexion personnelle autour du sujet.
Pour l’occasion, des artistes ont été missionnés. On pense notamment à la photographe Ludmilla Cerveny qui a arpenté la métropole girondine pour en rapporter des clichés. Des images d’arbres intégrés à la ville, volontairement ou non, des photos d’arbres que l’on ne voit plus mais qui invitent à la réflexion .
L’arbre, une architecture
Arboretum met en scène l’arbre sous différentes formes. Toujours dans cette dynamique de questionnement constant, l’arbre est présenté comme une source d’inspiration architecturale à travers des projets, des concepts et des idées. Des idées qui ont germé dans la tête des architectes et des artistes à travers le temps. On peut croiser tant bien des projets maisons arborées, où l’arbre est un interface ( à l’instar de la Daita2019 House de Suzuko Yamada) que des gravures d’arbre-maison du XVIIIème siècle.
L’un des projets présenté est particulièrement intéressant dans la mesure où il synthétise bien cette facette de l’exposition. Il s’agit du BEST Forest Building de James Wines : un supermarché volontairement fendu en deux par une ligne de chênes, pour la préserver. Une véritable révolution architecturale qui montre bien toute la profondeur du rapport à l’arbre dans la construction.
Ce premier aspect de l’exposition place réellement l’arbre au centre de la réflexion architecturale : il semble être l’élément ultime par les possibilités qu’il offre et l’inspiration qu’il renferme. Créer avec l’arbre, créer contre l’arbre ou créer grâce à l’arbre, voici le dilemme architectural qu’arboretum nous propose d’explorer.
L’architecture, un arbre
Au-delà de l’arbre inspirant – ou de l’arbre au cœur du processus créatif – l’exposition propose un autre niveau d’analyse, plus profond, mais tout aussi intéressant : le postulat que l’arbre partage les mêmes valeurs que l’architecture. Des valeurs qui peuvent être civiques et politiques : on plante par exemple des arbres en guise de victoire militaire au même titre que l’on érige un monument. Ces valeurs peuvent aussi être artistiques et créatives : arboretum présente le projet de Joseph Beuys nommé 7000 Eichen, un projet artistique visant à planter 7000 arbres dans la ville de Cassel en Allemagne dans les années 1980. Un projet mêlant art, écologie, aménagement du territoire (donc architecture) et, bien entendu, arbres.
L’exposition est en quelque sorte une ode aux arbres et à leur importance dans notre quotidien. C’est aussi une réflexion poussée sur leur utilisation et le crédit qui leur est accordé, comme l’explique Fabrizio Gallanti dans l’éditorial qui accompagne arboretum : « Le végétal semble être devenu une panacée, capable de guérir tous les maux de l’humanité. Pas un seul problème, dirait-on, qui ne puisse être résolu en faisant pousser une plante, ou une grande quantité de plantes : changement climatique, pollution, biodiversité, pénuries alimentaires, désertification, sans oublier notre bien-être psychique – tout cela serait réglé et aboutirait si l’on creusait un trou suffisamment profond pour y enraciner un peuplier ou un chêne.»
Le but serait alors également de questionner cette simplicité apparente, et de comprendre le lien étroit qui unit arbre et architecture depuis des siècles. Un questionnement passionnant et terriblement contemporain dont on ressort avec un regard nouveau, et dont chacun·e peut profiter jusqu’au 13 février 2022, dans les galeries d’arc en rêve.