La nostalgie des 90’s vue par Jus Jam sur Broken District

Le label bordelais Broken District vient de sortir un mini LP de l’artiste Jus Jam, en vinyle et digital. À cette occasion, rencontre avec les têtes pensantes du projet pour évoquer la démarche artistique de ce projet.

Sincérité et authenticité

Pour choisir les sorties de Broken District, Mathieu, Antoine & Stéphane piochent la plupart du temps dans les nombreuses démos qu’ils reçoivent. À moins qu’ils ne démarchent directement des artistes pour lesquels ils ont eu un coup de cœur. C’est notamment pour aider au développement d’artistes que les trois amis ont fondé ce label en 2018, à la manière de pionniers tels que les écuries Ninja Tune ou Warp, dans les années 1990, véritables modèles pour eux. Surtout, c’est pour défendre des esthétiques peu représentées par ailleurs au sein des sphères électroniques que le projet a vu le jour.

A force de sincérité et d’authenticité dans sa démarche artistique, les sorties du label Broken District sont soutenues par de nombreux disquaires, artistes et dj’s. La qualité de ses sorties lui permet d’être distribué dans les bacs de disquaires mythiques (on pensera notamment à Gramaphone, shop légendaire de Chicago), mais également en ligne. En effet, les nouveautés du label se retrouvent autant en digital qu’en physique avec le vinyle. Prenant en compte l’impact environnemental d’un tel objet, Broken District entend ne produire qu’un petit nombre de copies (300 en moyenne), qui seront toutes écoulées.

90s Anxiety, la dernière sortie de Broken District

90s Anxiety

En mars dernier, Broken District publiait un mini LP. Œuvre de Jus Jam, celui-ci s’intitule 90s Anxiety, et a été pensé comme « un projet qui assume tous (ses) goûts musicaux, qui (lui) ressemblent le plus ». Le processus de production qui a vu naître cette sortie a d’ailleurs vu le jour il y a deux ans, avec la construction des morceaux « Higher Sense » et « Wide ».

L’auteur du disque explique sa vision de la scène : « Quand on fait de la house, il y a une urgence à sortir des morceaux, c’est tout, tout de suite. Tu dois passer ton son en club vite, sinon il date rapidement ». Stéphane n’ayant plus l’envie d’adopter cette rythmique, il a commencé à appréhender ses créations d’une autre façon : « Je voulais que, si j’écoute mon morceau 3 mois après, je le trouve toujours aussi bon, pour pouvoir l’assumer. J’aimerais donc défendre cet EP plus longtemps ». L’artiste ajoute : « faire une sortie sur son propre label, c’est quand même plus relax, plus facile ». Il a donc pu laisser les morceaux reposer, infuser, prendre le temps d’écarter les compositions hors sujets pour créer 6 morceaux avec une sonorité et un univers cohérent, réunis sous le titre 90s Anxiety.

https://soundcloud.com/brokendistrict/sets/jus-jam-90s-anxiety-lp-out-now

Nostalgie des années 1990 ?

Le titre de ce mini LP est une référence à la nostalgie des années 1990, période plutôt « cool », qui évoque en même temps à l’artiste une forme d’anxiété, du fait de ne plus y être. Toutes ses influences sont issues de cette décennie, avec pour résultat cet album qui regorge de références à des titres et des groupes qui l’ont marqués, du rock de son enfance à la découverte du scratch à son apogée, quand il était âgé de 16-17 ans.

Interloqué à cette époque par les sons qu’il était possible de faire avec des platines, Stéphane passera ses week-ends chez un copain a faire du hip hop, du boom bap, puis s’essaye au scratch, au breakbeat, ghetto house… Une ouverture à tous les styles de musiques électroniques, jusqu’à la jungle. Gros coup de cœur pour ce style né à Londres au début des années 1990 qui reste encore sa préférence. Viendra ensuite la découverte des labels qui faisaient la part belle à différents artistes, le début d’une vocation pour lui qui confie avoir « l’envie de faire ce genre de musique ».

Du Two-step à David Lynch

Le résultat de 90s Anxiety est donc le produit de nombreuses influences musicales (jungle, two step, boom bap, le tout saupoudré de trap), ainsi que de diverses passions qui apaisent, vident la tête, des sports de montagnes de type rando, trail, escalade. Le cinéma, aussi. « Le quotidien peut parasiter la créativité et c’est important d’avoir la tête libre pour mieux faire de la musique. »

Des références à David Lynch sont ainsi présentes dans ce maxi EP (ou mini LP, c’est selon), dont l’ouverture du disque, sur un passage de Mulholland Drive, un clin d’œil loin d’être anodin pour Stéphane qui nous confie « David Lynch est un réalisateur qui me plaît, dans Twin Peaks comme dans tous ses films, il n’y a pas besoin de chercher de réponse, il faut se laisser porter par son cinéma. Je veux que les gens soient portés par ma musique, sans chercher de raison, sans explication suggérée ». À noter également une référence au manga Evangelion qui, avec le regard de l’adulte qu’il est maintenant, est résolument révolutionnaire, écologique.

Pour cette dernière sortie, il était important pour Jus Jam de ne pas cibler un type d’auditeur.ice particulier.e, de ne pas plaire à untel.le ou untel.le, se détacher de toute considération mercantile. L’artiste avait à cœur de transmettre une vision plus personnelle, plus désintéressée. « Si tu arrives à accrocher sans être un aficionado du truc, c’est réussi ». Pari gagné !

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