Trois ans après sa création, le groupe bordelais Bilbao Kung-Fu a sorti le 23 mai dernier son premier album, Où est passée l’innocence ?. Un disque brut, sincère et traversé par une tension entre rage et mélancolie. On a rencontré Natty, chanteur du groupe, à quelques jours de la sortie.
Crédit photos : Jean-Baptiste Laporte-Fray
« On est fiers, vraiment. Mais c’est stressant… On a mis beaucoup de nous dedans. » Natty, le chanteur de Bilbao Kung-Fu (ou « BKF ») ne cachait pas son émotion à l’approche du moment charnière. Si certains membres du groupe ont abordé la sortie de ce premier album avec calme, lui confiait un mélange d’impatience et de nervosité. Il faut dire que Où est passée l’innocence ? n’est pas seulement un objet musical : il raconte une évolution, un apprentissage collectif, une mue artistique.
De Mama Psyché à Bilbao Kung-Fu
Né en 2020 sur les cendres de Mama Psyché, Bilbao Kung-Fu est un projet en constante réinvention. À ses débuts, le groupe explore une esthétique entre pop et psyché, écrit ses premiers textes du côté de l’Île d’Oléron, se cherche, doute, apprend. Les premières tournées donnent de l’assurance à ses membres. Puis vient un second EP, plus rock, mais qui crée des tensions internes. En 2023, Jeff quitte le groupe, marquant un tournant. Le son se durcit, les paroles s’assombrissent.
En évoquant ces évolutions, Natty confie : « On a voulu aller plus loin, plus sincèrement. On s’assume davantage aujourd’hui. » Le nom même du groupe reflète ce mélange d’énergie brute et d’absurde. Il est inspiré d’un fait divers s’étant déroulé à Bilbao, impliquant un faux moine shaolin. Bilbao Kung-Fu évoque un choc improbable entre douceur et combat. Une tension qu’on retrouve dans sa musique.


Où est passée l’innocence ?, claque sentimentale
Ce premier album, c’est un cri. Les morceaux explorent des désillusions amoureuses, des désirs de renaissance, un besoin d’avancer malgré les chutes. Le titre fait écho à aux premières compositions de la formation, et au sentiment que certaines choses ne reviendront plus. Mais derrière la douleur, il y a aussi une lueur.
À propos d’Où est passée l’innocence ?, Natty explique : « L’album raconte un moment de down, mais il y a des morceaux comme « Un autre été » qui sont plus lumineux. » Musicalement, BKF s’inscrit dans une lignée post-punk, mêlant énergie brute, sonorités new wave, et un souffle mélodique proche de The Police voire d’Étienne Daho. Ses membres revendiquent un son qui « transpire la vérité ». Parmi les morceaux les plus marquants de l’album, « Dep » se distingue par sa sobriété bouleversante, tandis que « Un autre été » offre un contraste d’atmosphère, plus doux, plus ample.
Le live, c’est le nerf de la guerre.
Natty (Bilbao Kung-Fu)
« On veut jouer, jouer, jouer »
Le groupe ne compte pas s’arrêter là. Après une release party organisée le 5 juin, et une tournée estivale en préparation, Bilbao Kung-Fu entend bien défendre cet album sur scène dans les semaines et mois à venir – là où son énergie prend toute son ampleur. La rentrée s’annonce aussi chargée, même si certaines dates restent confidentielles pour l’instant.
« Le live, c’est le nerf de la guerre. On veut jouer, jouer, jouer. » insiste Natty. En attendant de nouvelles dates, le groupe compose déjà la suite. Et compte bien capitaliser sur Où est passée l’innocence ?, sorti le 23 mai dernier sur toutes les plateformes. Un album qui fait du bien là où ça fait mal. Qui parle à celles et ceux qui doutent, tombent. Et décident malgré tout de continuer.