Rencontre avec le collectif bordelais Helix, à l’occasion de son premier anniversaire fêté à l’IBOAT le jeudi 8 mai. Sa vision sur la scène électronique locale, un bilan sur cette première année d’existence, ses ambitions pour son avenir : entretien.
Le Type : En un an, quels ont été les moments les plus marquants qui ont solidifié votre identité en tant que collectif et comment votre son a-t-il évolué depuis vos premières dates ?
Helix : L’année 2024 a été marquée par trois grands événements qui ont permis au public bordelais de découvrir et d’identifier notre collectif. Tout d’abord, notre tout premier événement à l’IBOAT, le 28 mars 2024. L’équipe du lieu nous a fait confiance en nous offrant un all night long. À ce moment-là, nous n’avions encore rien construit concrètement, seulement l’idée du collectif. L’aventure de tout monter en un temps record a été très formatrice.
Ensuite, nous avons joué à Darwin le 7 août. Se produire sur cette scène bordelaise, emblématique depuis de nombreuses années, représentait une étape importante pour nous. Enfin, notre plus gros événement à ce jour s’est déroulé en août également, une nouvelle fois à l’IBOAT. Nous avons investi l’ensemble du bateau avec une scénographie entièrement repensée, un atelier de sérigraphie et une exposition photo. Nous nous sommes produits avant des artistes confirmés tels que Kasper Marott et OK EG. Cet événement a été une véritable réussite, qui nous a donné l’élan pour poursuivre notre aventure de manière plus professionnelle.
Depuis, nous avons diversifié nos projets, allant de la diffusion (via SoundCloud) à l’organisation d’événements. Nous avons lancé un format after à l’Organiq, un format vidéo est en cours de développement, et nous avons eu la chance d’être programmés dans différents lieux bordelais. Nous en sommes très reconnaissants.

La musique semble de plus en plus traitée comme un produit de consommation.
Helix
Quel regard portez-vous sur cette scène électronique bordelaise ?
La scène bordelaise est très riche, avec de nombreux collectifs et artistes talentueux. Le véritable problème réside dans le manque de lieux pour se produire et se faire découvrir. Nous avons néanmoins vu émerger de très belles initiatives, comme la Bordeaux Electronic Week (BEW), qui a rassemblé plusieurs collectifs locaux pour offrir au public une expérience qualitative et cohérente.
Nous déplorons toutefois l’omniprésence actuelle de la hard music, qui tend à occuper tout l’espace. La musique semble de plus en plus traitée comme un produit de consommation, perdant ainsi son sens premier. Ce phénomène est renforcé par l’essor des plateformes de diffusion et des réseaux sociaux, qui favorisent une écoute rapide, souvent déconnectée de l’intention artistique.
Il est difficile pour nous de nous insérer dans cette spirale, mais cela nous pousse à nous battre pour les valeurs et le sens essentiels que la musique porte selon nous. Ce style, qui avait à l’origine un vrai engagement et une profondeur culturelle, se retrouve aujourd’hui quelque peu vidé de son sens, faute d’un public insuffisamment curieux de son histoire et de ses fondements.
De notre côté, nous essayons de défendre la culture club, intrinsèquement liée à la techno, et nous nous efforçons d’adopter une démarche éducative auprès du public même si cela reste complexe. Nous cherchons à transmettre les codes et les valeurs de cette musique qui nous est chère.


Nous avons pour ambition de proposer des événements de plus en plus immersifs
Helix
Entendez-vous développer Helix au-delà de Bordeaux ?
Tout à fait, nous avons notamment joué le mois dernier à La Capsule du Badaboum, à Paris, et d’autres dates sont actuellement en préparation. Les membres d’Helix étant originaires de différentes régions de France, cela nous a permis de bâtir un réseau à l’échelle nationale.
Nous réfléchissons également à plusieurs projets en collaboration avec des collectifs partageant nos valeurs et nos ambitions. Tout en restant fidèle à nous-mêmes, nous avons pour ambition de proposer des événements de plus en plus immersifs, avec des scénographies ambitieuses dont s’occupe Yendi au sein de notre collectif.
Quel bilan tirez-vous de cette première année d’existence, et comment ces expériences nourrissent-elles vos ambitions pour la prochaine année ?
Nous avons la chance de former un groupe totalement autonome et pluridisciplinaire, composé de graphistes, d’un scénographe, d’un ingénieur du son, d’un chargé de communication, d’un comptable… Et, surtout, de personnes passionnées par la musique, qui aiment autant jouer que créer et organiser.
Cette diversité de compétences nous permet d’aborder chaque projet dans sa globalité de la direction artistique à la production, en passant par la communication. Au fil de cette première année, ces expériences ont renforcé notre cohésion, affiné notre vision, et nourri des ambitions plus précises : développer nos propres productions musicales, collaborer avec des collectifs partageant nos valeurs, et proposer des événements toujours plus immersifs, exigeants et soignés.
Nous aspirons à faire d’Helix un projet culturel à grande échelle, porteur de sens et de valeurs fortes.
Helix
Notre objectif va au-delà de la simple organisation d’événements. Nous aspirons à faire d’Helix un projet culturel à grande échelle, porteur de sens et de valeurs fortes. Faire vivre un collectif n’est pas simple loin de là. Mais nous sommes fiers du chemin parcouru, et pleinement conscients que la route est encore longue.
À quoi s’attendre pour votre anniversaire à l’IBOAT ?
Pour célébrer notre anniversaire à l’IBOAT, nous avons invité nos amis du label parisien RARE, avec qui nous partageons une véritable affinité artistique et humaine. Nous avons conçu une nouvelle scénographie immersive, pensée pour que le public puisse pleinement vivre la musique, au-delà de la simple écoute. Parmi les invité·es, on retrouvera dans la cale MANEA, résident d’Helix qui ouvrira la soirée, suivi d’un back-to-back entre un autre de nos résident, CLOVIS avec Yargui de RARE. Ensuite, ce seront SAM AMA et ALDO, deux résidents du label RARE, qui prendront le relais pour clôturer la programmation de la cale. Au Miniclub, nous avons concocté un véritable mélange de nos deux univers – une « salade » musicale à l’image de notre complicité avec RARE.
Cet événement est un moment fort pour nous : il permettra au public de découvrir pleinement notre identité musicale, tout en mettant en lumière un label qui nous est cher, riche de jeunes talents prometteurs.
Quelles sont vos envies pour la suite d’HELIX ?
Pour la suite, nous souhaitons poursuivre nos différents projets, comme les séries de podcasts, dans lesquelles nous collaborons principalement avec des agences, des labels et des artistes graphistes. L’idée est de faire découvrir au public des talents musicaux mais aussi visuels, en mettant en avant des univers complets et cohérents.
Nous avons également pour ambition de continuer à nous exporter à travers la France. Plusieurs dates sont déjà en préparation pour 2025, et nous avons hâte de partager ces nouvelles étapes. Nous tenons à remercier toutes les personnes qui se sont investies, de près ou de loin, ainsi que tous les lieux qui nous ont fait confiance et permis de nous développer au cours de cette première année d’existence.
Enfin, nous préparons notre premier gros événement indépendant, prévu à la fin de l’été, dans un lieu encore peu exploité à Bordeaux. Nous sommes impatients de pouvoir en dévoiler davantage…