L’artothèque : ces œuvres qui nous habitent

Focus sur L’artothèque, un lieu culturel de Pessac, proposant d’emprunter des œuvres d’arts chez soi ou dans des lieux partagés. Une façon de redéfinir notre rapport à l’art et de rappeler la dimension sociale de l’art.

Après les livres et les CDs, pourquoi ne pas introduire l’art chez soi ? C’est l’ambition portée par l’artothèque de Pessac, qui met à la disposition du public un remarquable fonds de 1132 œuvres contemporaines, librement empruntables. À domicile, dans les hôpitaux, les universités ou encore les établissements pénitentiaires, ces œuvres s’installent et nouent un lien singulier avec les individus. En investissant ces lieux de vie, elles redéfinissent notre rapport à l’art, le rendant à la fois plus intime et plus inclusif.

Faire de l’art un bien commun 

Implantée à Pessac, l’artothèque s’inscrit pleinement dans le tissu culturel local à l’image d’une bibliothèque ou d’une médiathèque. Fondée en 2002, elle bénéficie du soutien actif de la municipalité et s’articule autour d’un objectif fondamental : rendre plus accessible l’art en faisant tomber les barrières sociales et économiques.

En autorisant le prêt d’œuvres d’art à toute personne désireuse de les accueillir temporairement, l’artothèque permet une immersion dans le train de vie de chacun. Cette proximité inédite bouleverse les usages traditionnels de l’art, en le déplaçant du musée vers l’espace privé ou collectif.

L’arthotèque permet de créer une passerelle.

Corinne Veyssière (L’artothèque)

Mais l’artothèque n’est pas uniquement un lieu de prêt, elle est également un espace de rencontre. Expositions temporaires, conférences et ateliers y sont organisés tout au long de l’année: « L’arthotèque permet de créer une passerelle » affirme Corinne Veyssière, cofondatrice de la structure.

Un principe simple pour une palette de choix différents

L’accès aux œuvres de l’artothèque repose sur le principe de l’adhésion. Selon le profil de l’emprunteur (particulier, entreprise, collectivité ou groupes scolaires et centres) les tarifs sont adaptés et demeurent accessibles. À titre d’exemple, un particulier peut bénéficier d’un abonnement de deux mois pour dix euros, lui permettant d’accueillir chez lui une œuvre issue de la collection. « Dans les hôpitaux, c’est capital, les médecins choisissent les œuvres, c’est un moyen de faire un pas de côté sur des moments durs » indique Corinne Veyssière.

Cette dernière, riche de 1132 pièces, offre un patchwork varié de créations contemporaines, bien que délibérément orientée vers certains formats. Ainsi, près d’un tiers des œuvres sont des photographies, le reste se compose essentiellement d’œuvres sur papier : dessins, gravures, sérigraphies…. L’artothèque ne propose ni sculptures ni peintures sur toile, choix qui s’explique sûrement par des raisons de conservation et de logistique.

Au-delà de leur diversité catégorique, les œuvres réunies ont en commun d’interroger des problématiques actuelles : écologie, féminisme, territoires… Ainsi, la collection constitue un miroir critique et engagé de notre époque.

L’art se dynamise 

Ce qui distingue l’artothèque de Pessac des musées traditionnels, c’est la manière dont le public s’approprie ses œuvres. Les musées, pensés comme des terrains de rencontre entre différentes collections, créent un lien organique temporaire avec son public. L’artothèque, elle, initie un rapport plus intime et lent à la création artistique.

Le prêt d’une œuvre permet à celle-ci de quitter le cadre institutionnel pour s’installer chez l’emprunteur. Cette présence prolongée favorise un lien sensible et personnel avec l’objet. Dans les lieux partagés (universités, hôpitaux,…) ces œuvres peuvent jouer un autre rôle : elles deviennent vecteurs d’échanges.

La structure met également à disposition des mallettes pédagogiques à destination des enseignants. Ces outils regroupent une sélection d’œuvres accompagnée d’une documentation, permettant à ces derniers de construire des ateliers autonomes avec leurs élèves et de rassembler plusieurs matières autour de la table : « des mallettes utilisées pour des matières transversales ».

L’artothèque de Pessac incarne ainsi une autre manière de concevoir la rencontre entre l’art et son public : plus libre et ancrée dans le quotidien. En rendant possible l’appropriation personnelle d’œuvres, elle transforme notre manière d’appréhender l’art, loin des lectures traditionnelles. Chaque année, de nouvelles œuvres viennent enrichir la collection (11 acquisitions ont ainsi été réalisées en 2024) témoignant d’un projet en constante évolution, ouvert à tout public, celui d’aujourd’hui et de demain.