Réaliser en indé : portrait croisé

Portrait croisé de Clara Pelletier et Zian Palau, deux jeunes réalisateur·ices de Bordeaux qui reviennent sur la fabrique de leur projet de films. De l’idée de départ à la gestion du matériel en passant par les difficultés liées à un tournage, les deux créateur·ices émergent·es évoquent les enjeux liés à la production d’un documentaire (Amours, la révolution Z pour la première) et d’une fiction (Ce qui restera pour le second).

Crédit photo : Maxence Mataud

« Une bonne idée ou une bonne histoire ». Lorsqu’on l’interroge sur la recette de la réalisation d’un bon film, Clara Pelletier ne tergiverse pas. La diplômée d’un Diplôme universitaire de technologie (DUT) Métiers du multimédia et de l’internet, d’une licence de communication puis d’un Master met la créativité au centre de ses projets de film. C’est d’ailleurs ce qui l’a conduit à concevoir son premier documentaire, Amours, la révolution Z, qui a été soutenu par le prix de la jeune création M6+.

De son côté, Zian Palau sort en cette fin d’année 2025 Ce qui restera, un long-métrage entièrement auto-produit et tourné entre Bordeaux et Capbreton. Ayant étudié deux ans en classe préparatoire littéraire avant d’obtenir un Master en journalisme, il explique avoir tendance à se lancer de manière spontanée dans la réalisation d’un projet de film. « Je le fais, au pire ça ne fonctionnera pas. L’important c’est d’en avoir envie » explique-t-il lorsqu’on l’interroge sur ce qui le motive dans une telle fabrique cinématographique. Lui et Clara témoignent de deux approches créatives. Mais se rejoignent sur une volonté commune : réaliser des films en autonomie, avec ou sans soutien extérieur.

Clara Pelletier, réalisatrice du documentaire Amours, la révolution Z.

L’impulsion de départ

Qu’est-ce qui pousse à se lancer dans un projet cinématographique ou documentaire ? Pour Clara Pelletier, c’est sa participation au concours de la jeune création M6 qui s’est avérée déterminante. Elle qui explore dans son film la manière dont la génération Z « redéfinit les codes de l’amour, entre applications de rencontre, nouvelles formes de relations et amitié » a pu bénéficier d’un soutien de départ non négligeable dans l’implémentation de son projet. Pour Zian Palau, l’impulsion vient d’une idée de départ, source première de motivation, comme celle du personnage principal de son dernier film, Gaspar, un metteur en scène obsessionnel qui voit son travail menacer sa relation avec Lola, qui rêve de vivre de sa musique mais se résigne peu à peu.

La construction d’Amours, la révolution Z commence pour Clara par une enquête qui l’amènera à se documenter sur son sujet : l’amour en 2025. « Le premier truc c’est le sujet, l’angle, ce que tu veux dire et à qui. Puis il faut aller chercher toute la matière […]. Tu vas lire et écouter tout ce que tu peux » raconte-t-elle avec enthousiasme lorsqu’elle se remémore le point de départ du projet.

Zian, lui, a commencé par imaginer un plan de scène, puis écrit un premier script : « Quand tu te lances pour la première fois, tu découvres ce que ça donne […]. Au fur et à mesure, tu repères des plans que tu aimes dans les films, puis tu grandis et ton œil change. »

Investissement technique

Réaliser un documentaire, dans le cas de Clara Pelletier, ou un film, dans celui de Zian Palau, nécessite de fait du matériel technique et professionnel. Pour la première, tout est une question d’organisation et de rigueur : « En fonction des interviews qu’on doit mener tel jour, il faut anticiper nos besoins, en micro ou en caméra. Et se débrouiller pour louer ou demander de l’aide à telle ou telle personne en fonction de ce qu’on a déjà ».

Zian, lui, confie profiter de son entourage et de son réseau pour mener à bien son projet. « J’ai bien sûr investi du matériel spécialement pour le film. Mais j’ai aussi mon matériel personnel [… ]. Chaque personne faisant partie du tournage ramenait du matériel que je n’avais pas forcément. Ça peut être un casque pour le son ou des spots pour les lumières par exemple. »

Zian Palau, réalisateur de Ce qui restera.

Gestion et organisation : le quotidien des réals

Comme pour tout projet, quelques difficultés peuvent survenir au cours du processus. L’une d’elles concerne par exemple les choix de plans à conserver ou non : « Sur une heure d’interview, on en garde parfois seulement une minute trente […] Le sujet est tellement large et ouvert qu’il est dure de le refermer » évoque la réalisatrice du documentaire Amours, la révolution Z. Zian se bat pour sa part avec une dizaine de tableurs : « C’est vraiment la partie la plus dur. Avoir pleins de tableaux Excel avec les disponibilités des gens et celles des lieux à louer. » Une coordination qui se doit d’être minutieuse pour la bonne réalisation du projet.

Stress, annulations de dernières minutes : le tournage est sûrement la partie la plus éprouvante de l’aventure cinématographique. On passe en effet d’une vie de bureau à écrire, imaginer et mettre en forme une idée, au contact avec le terrain, plus intense et fatigante, avec des choix à faire en permanence. « Parfois, tu caches un peu la misère. Le plan rend trop bien et derrière la caméra, il y a trois membres de l’équipe qui arrêtent les gens pour qu’ils ne passent pas devant la caméra » explique par exemple Zian.

Clara, elle, décrit le stress inhérent à une telle production : « Tu dois tout organiser et gérer en même temps. Tu es au milieu de tout et tu as toujours des imprévus. » Mais reste positive sur la suite de son parcours dans ce monde du cinéma : « Il y a encore plein de choses que je vois à améliorer. Je vois plus ça comme un challenge ; il faut bien commencer quelque part pour pouvoir s’améliorer. »