Zoom sur le festival Bordeaux Open Air qui entend chaque année faire de ses événements des espaces d’inclusion pour les personnes en situation de handicap. Grâce à des dispositifs adaptés, l’acquisition de matériel dédié et une démarche active et assumée, l’association qui pilote le projet fait figure de précurseuse sur cette question au sein de la scène électronique locale.

Cet article s’inscrit dans le cadre de la série d’articles Focus : Culture & handicap. La série a été rendue possible grâce au soutien du dispositif Adaptathon.
Le festival Bordeaux Open Air (BOA) est un événement emblématique de la scène musicale électronique bordelaise, dont la première édition eut lieu durant l’été 2016. L’événement a vu le jour grâce à la création de l’association du même nom, il y a 10 ans, conçue spécifiquement pour réunir les Bordelais·es, le dimanche, autour des musiques électroniques.
Dans les parcs et jardins de la métropole, Bordeaux Open Air s’impose comme un acteur majeur de la scène culturelle bordelaise, mettant l’accent sur la mise en lumière des cultures électronique. Le festival se distingue par une programmation variée et rythme les dimanches estivaux d’un public plutôt intergénérationnel. Depuis sa création, l’association a en effet pour objectif de promouvoir et de participer à la démocratisation des musiques électroniques sur la métropole bordelaise, via le festival et des activités annexes. Au-delà de son aspect festif et musical, Bordeaux Open Air se démarque par ailleurs par son engagement à rendre son événement accessible et inclusif pour toutes et tous.

BOA, l’accessibilité au cœur de la démarche
L’accessibilité est un enjeu fondamental pour Bordeaux Open Air, qui a notamment construit l’identité de son festival autour cette intention. Toujours situé à proximité des transports en commun, son ouverture repose plus largement sur l’attention portée aux publics accueillis, notamment celles et ceux en situation de handicap. Cette volonté d’inclusivité s’est opérée dès la conception du premier événement, avec des initiatives réfléchies en matière d’aménagement de l’espace et de services. Puis, la période du COVID a amené l’équipe à réinterroger le sens de ce terme afin de faire évoluer l’approche de son événement.
Pour construire de nouvelles offres prenant en compte l’ensemble des publics pouvant être confrontés à des situations empêchant ou limitant l’utilisation des différents espaces du festival, l’association Bordeaux Open Air s’est engagée dans une démarche d’investigation. En 2021, le premier travail de recherche fut de trouver des interlocuteur·ices spécialisé·es sur ces questions. Après multiples recherches et quelques formations spécialisées, c’est auprès d’associations et de groupements de personnes désireux de partager leurs connaissances et savoir-faire que l’équipe de BOA s’est projetée dans la mise en place de nouvelles adaptations pour garantir à chacun·e de vivre pleinement l’expérience.
Grâce à cette intention commune de favoriser la participation de chaque personne à la culture et le soutien de plusieurs acteur·ices du territoire, Bordeaux Open Air s’est positionnée dans une démarche de développement de ses dispositifs d’accueil comprenant l’acquisition de matériels spécifiques.

Des dispositifs et des aménagements spécifiques pour une expérience optimale
Le festival étant programmé dans différents parcs et jardins de la métropole, l’aménagement se conçoit et s’adapte aux spécificités de chacun de ces sites pour répondre aux besoins des publics. Ainsi, au-delà de la mise en place – obligatoire depuis le décret du 7 août 2017 relatif à la prévention des risques liés aux bruits – de zones de repos auditifs, Bordeaux Open Air propose plusieurs autres dispositifs pour vivre pleinement l’expérience de ces événements.
Parmi ceux obligatoires mis en place depuis la première édition : les bouchons d’oreille disponibles gratuitement dans une borne Echo-low, des casques anti-bruits pour enfants et adultes, au moins une toilette accessible aux personnes à mobilité réduite, et des comptoirs abaissés (4 mètres sur une vingtaine). Aussi, certains foods trucks présents durant le festival sont adaptés.
Par la suite, grâce à une subvention de la Fondation d’entreprise Harmonie Mutuelle en mars 2021, le premier investissement matériel fut un fauteuil joëlette. Fauteuil roulant mono-roue, tout-terrain, conçu à l’origine pour la randonnée, il permet à toute personne en situation de handicap de se déplacer dans les parcs, avec l’aide d’au moins deux accompagnateur·ices. Une façon pour les personnes à mobilité réduite de profiter du festival, comme cela a pu être expérimenté au Parc des Angéliques, lors d’un projet réalisé avec un EHPAD.
À la suite d’ateliers d’initiation à la musique assistée par ordinateurs, de siestes électroniques et d’une boom, l’aboutissement du projet fut la venue des résident·es de cet EHPAD au festival. Autre dispositif : des recharges pour fauteuils électriques, fauteuils plus faciles à manier sur des terrains accidentés, sont à disposition des festivaliers.

Gilets connectés
Bordeaux Open Air fut aussi l’une des premières associations bordelaises à acquérir, en octobre 2021, un dispositif devenu phare sur le festival : cinq subpacs. Ces gilets connectés à la régie permettent aux personnes sourdes ou malentendantes de ressentir la musique par des vibrations. Se portant sur la poitrine ou dans le dos, chaque personne peut ensuite se déplacer sur le site et gérer par elle-même l’intensité des vibrations.
Obtenu grâce au soutien d’Olivier Escots, adjoint au maire de Bordeaux chargé du handicap et de la lutte contre toutes les discriminations, ce dispositif se balade sur le département entier. L’association BOA le propose en effet en prêt à d’autres organismes et structures du territoire. Les gilets ont par exemple été prêtés durant des concerts organisés à l’Institut national de jeunes sourds et muets de Bordeaux mais aussi à la Fête du Vin, au Lacanau Pro et à la Surfrider pour des ateliers de découverte des ultrasons émis par les mammifères marins.
L’association BOA a elle aussi participé à une journée de sensibilisation auprès des enfants sourd·es, malentendant·es et entendant·es au Musée d’Aquitaine dans le cadre de l’inauguration du nouveau parcours sensoriel du musée, organisée par la Mairie de Bordeaux. La présence de ces gilets durant le festival encourage les personnes à venir les essayer et découvrir leur fonctionnement.

Sensibiliser pour créer un environnement inclusif
Sensibiliser son public à la question de l’accessibilité est une priorité pour Bordeaux Open Air. En amont de chaque édition, le festival assure une communication transparente et proactive pour informer les festivalier·es des dispositifs accessibles durant l’événement. Ces informations sont disponibles sur leur site internet et sur les réseaux sociaux, précisant notamment les modalités d’accès et de réservation de ces services. Une boîte mail a été spécialement créée pour échanger directement avec l’équipe. La tente « accueil » située à l’entrée, regroupant tous les dispositifs, garantit aux festivalier·es une immersion sereine dès leur arrivée.
Les bénévoles sont aussi sensibilisés aux handicaps et aux difficultés rencontrées par ces publics. Un « welcome kit » leur détaille les valeurs du festival et leur transmet cette notion souhaitée d’accessibilité jusqu’aux premiers éléments de langage de la langue des signes. Ainsi, durant l’événement, chaque membre de l’équipe est en capacité d’assurer une veille, un soutien et d’être disposé à répondre aux demandes. Cette sensibilisation générale est un gage d’attention des un·es envers les autres et de bienveillance des publics entre eux.

Un festival qui poursuit ses engagements
En parallèle des demandes de réservation des dispositifs qui augmentent, l’association continue d’actualiser ses connaissances sur le sujet, observant aussi ce qui se fait ailleurs et les récentes innovations. Bordeaux Open Air entend ainsi suivre les tendances à la mesure de ses capacités financières. Dans les projections futures, l’association aimerait travailler sur un support en lien avec un handicap encore peu abordé : le handicap visuel. Le souhait de son équipe serait de disposer d’un plan, des parties des sites exploités, en braille. Aussi, comme les gilets sont très souvent demandés, l’association aimerait pouvoir en acquérir de nouveaux, leur volonté étant de mutualiser cet achat avec d’autres acteur·ices du milieu culturel de la région.
L’engagement du festival se révèle également à travers la prise en compte des retours d’expérience du public afin d’envisager encore d’autres axes d’amélioration. Les échanges organisés en 2021 ont favorisé la venue des personnes en situation de handicap, ayant eu le sentiment d’être reconnues et autorisées à participer à ce type d’événement. Chaque année, le festival affine son approche, dans un principe d’équité, pour offrir une expérience encore plus inclusive et respectueuse de chacun·e. En alliant musiques électroniques, convivialité et engagement social, Bordeaux Open Air confirme son rôle de précurseur dans le domaine de l’accessibilité des festivals.
- Cet article s’inscrit dans le cadre de la série d’articles Focus : Culture & handicap. La série a été rendue possible grâce au soutien du dispositif Adaptathon.
